{"title":"Soi-même comme un autre. Jean-Marc Tera’ituatini Pambrun: Ethos d’un écrivain mā’ohi","authors":"Mohamed Aït-Aarab","doi":"10.1353/nef.2023.a905918","DOIUrl":"https://doi.org/10.1353/nef.2023.a905918","url":null,"abstract":"Abstract:Un écrivain, dit-on, écrit toujours le même livre pour parler d’un seul et unique sujet, lui-même. L’œuvre de Jean-Marc Tera’ituatini Pambrun, multiple, éclatée, diverse, se distingue notamment par sa faculté et sa volonté d’aborder des territoires littéraires multiples. On connaît peu et mal l’homme, trop tôt disparu (2011), écorché vif aux engagements incandescents. Son roman Le Bambou noir (2005) dévoilait, précautionneusement, une personnalité inquiète, souvent à contre-courant de la pensée dominante, des valeurs du groupe. L’œuvre de Pambrun est traversée par les questionnements sur une identité (personnelle, collective) qu’il s’agit de mettre au jour, ensevelie qu’elle fut (qu’elle est?) sous des “flots d’encre” (Margueron). Mais une réflexion sur le sujet ne peut s’envisager sans tenir compte de l’Autre. La confrontation avec l’altérité, qu’elle s’avance bienveillante ou se révèle dominatrice, est un passage obligé pour qui veut penser sa présence au monde, sa place dans l’histoire.","PeriodicalId":19369,"journal":{"name":"Nouvelles Études Francophones","volume":"49 1","pages":"21 - 7"},"PeriodicalIF":0.0,"publicationDate":"2023-09-01","publicationTypes":"Journal Article","fieldsOfStudy":null,"isOpenAccess":false,"openAccessPdf":"","citationCount":null,"resultStr":null,"platform":"Semanticscholar","paperid":"139344325","PeriodicalName":null,"FirstCategoryId":null,"ListUrlMain":null,"RegionNum":0,"RegionCategory":"","ArticlePicture":[],"TitleCN":null,"AbstractTextCN":null,"PMCID":"","EPubDate":null,"PubModel":null,"JCR":null,"JCRName":null,"Score":null,"Total":0}
{"title":"Entretien croisé avec Nicolas Pitz et Nicolas Wouters","authors":"Alicia Lambert, Nicolas Pitz, Nicolas Wouters","doi":"10.1353/nef.2023.a905932","DOIUrl":"https://doi.org/10.1353/nef.2023.a905932","url":null,"abstract":"Entretien croisé avec Nicolas Pitz et Nicolas Wouters Alicia Lambert (bio), Nicolas Pitz (bio), and Nicolas Wouters (bio) Les entretiens ont été initialement réalisés en visioconférence (Teams), le 07 octobre 2021 avec Nicolas Wouters, et le 19 janvier 2022 avec Nicolas Pitz. Les enregistrements ont ensuite été retranscrits, afin que certaines parties puissent être sélectionnées et adaptées à la publication d’un entretien croisé, avec l’accord des deux auteurs. alicia lambert: Les bandes dessinées Les Jardins du Congo (Nicolas Pitz, 2013) et Elle ne parlait jamais du Congo (Nicolas Wouters, 2017) sont dédiées à l’expérience de vos grands-parents en tant qu’anciens colons dans le Congo belge des années cinquante. Qu’est-ce qui vous a amenés vers ce sujet? nicolas pitz: C’était cette envie de savoir d’où on vient, de savoir qui étaient mes parents et grands-parents. Il y avait plein de secrets de famille. Le fait que mes grands-parents et mes parents avaient vécu au Congo, c’était assez caché, presque invisibilsé. Que cela soit chez mes grands-parents ou chez mes parents, il y avait toujours des objets, mais ils étaient cachés. En étant enfants, on jouait avec, mais on ne savait pas vraiment ce que c’était. Mes cousins et moi avons simplement posé des questions. Un jour, à l’adolescence, je demande à mes grands-parents de m’expliquer ce que c’était le Congo. C’était très frustrant, je posais des questions très simples, et je me retrouvais face à un mur. Toutes leurs réponses étaient complètement contradictoires, rien n’était clair. On me disait des banalités historiques, comme si j’ouvrais un Wikipedia aujourd’hui. Moi, ce qui m’intéressait, ce n’était pas la grande histoire, mais ce qu’eux avaient été faire là-bas. Confronté à un mur de mécaniques de défense, je creusais, donc je dérangeais. Je posais les mauvaises questions, et c’est ça qu’il fallait faire. nicolas wouters: Je savais que j’allais faire une thèse de doctorat à l’Université Catholique de Louvain (UCL). J’avais fait de la BD, et j’avais étudié le cinéma à l’Institut des Arts de Diffusion (IAD). Il y avait déjà cette idée, dans la thèse, de travailler sur la transmission de la mémoire et sur l’animation. Mon travail de fin d’études en BD, c’était sur mon grand-père, du côté de mon [End Page 192] père (sur son éducation chrétienne), et j’avais bien aimé travailler sur une figure familiale. Puis j’ai pensé au grand-père du côté de ma mère, qui était parti au Congo. Et je me suis vite rendu compte qu’il y avait un problème, lié au fait que les destins masculins avaient été énormément abordés dans la famille. J’avais l’impression qu’il n’y avait rien qui résistait à une espèce de biographie héroïque de mon grand-père au Congo. J’ai repensé à la relation que j’avais avec ma grand-mère, car mon grand-père est mort quand j’étais très jeune. Derrière l’impression que j’avais que mon grand-père était le centre d’intérêt, j’étais fourvoyé par cette espèce d’imaginaire patriarcal. Je trouvais c","PeriodicalId":19369,"journal":{"name":"Nouvelles Études Francophones","volume":"10 1","pages":"0"},"PeriodicalIF":0.0,"publicationDate":"2023-01-01","publicationTypes":"Journal Article","fieldsOfStudy":null,"isOpenAccess":false,"openAccessPdf":"","citationCount":null,"resultStr":null,"platform":"Semanticscholar","paperid":"136003152","PeriodicalName":null,"FirstCategoryId":null,"ListUrlMain":null,"RegionNum":0,"RegionCategory":"","ArticlePicture":[],"TitleCN":null,"AbstractTextCN":null,"PMCID":"","EPubDate":null,"PubModel":null,"JCR":null,"JCRName":null,"Score":null,"Total":0}
{"title":"À corps et à cris: Itinéraires de deux auteures tahitiennes engagées, Chantal T. Spitz et Titaua Peu","authors":"Audrey Ogès","doi":"10.1353/nef.2023.a905925","DOIUrl":"https://doi.org/10.1353/nef.2023.a905925","url":null,"abstract":"Abstract: La littérature francophone polynésienne s’inscrit dans un contexte post-colonialiste dont les conséquences continuent d’affecter les territoires et les populations. Ce sont bien souvent des femmes qui prennent la plume pour dénoncer les violences commises, qu’elles soient exogènes ou endogènes. Chantal T. Spitz et Titaua Peu comptent parmi les auteures influentes et très engagées pour leur pays. Elles expriment toute leur colère et toute leur rancœur, alors qu’elles disent vivre dans des pays encore colonisés. Dans cet article, nous nous pencherons sur leurs parcours d’écrivaines polynésiennes. Comment expriment-elles leur propre vision de l’existence et de l’Histoire? En quoi l’originalité de leur écriture continue-t-elle de nous surprendre et de nous “interloquer”?","PeriodicalId":19369,"journal":{"name":"Nouvelles Études Francophones","volume":"87 1","pages":"0"},"PeriodicalIF":0.0,"publicationDate":"2023-01-01","publicationTypes":"Journal Article","fieldsOfStudy":null,"isOpenAccess":false,"openAccessPdf":"","citationCount":null,"resultStr":null,"platform":"Semanticscholar","paperid":"136003157","PeriodicalName":null,"FirstCategoryId":null,"ListUrlMain":null,"RegionNum":0,"RegionCategory":"","ArticlePicture":[],"TitleCN":null,"AbstractTextCN":null,"PMCID":"","EPubDate":null,"PubModel":null,"JCR":null,"JCRName":null,"Score":null,"Total":0}
{"title":"Le théâtre en Polynésie française: Bibliographie critique","authors":"Sylvie André","doi":"10.1353/nef.2023.a905929","DOIUrl":"https://doi.org/10.1353/nef.2023.a905929","url":null,"abstract":"Le théâtre en Polynésie françaiseBibliographie critique Sylvie André Plutôt que le théâtre proprement dit, il apparaît plus opportun d’envisager les réalisations de la théâtralité en Polynésie française. En effet, la notion de théâtre telle que nous l’entendons en Europe correspond à peu de réalisations dans le Pays de la part d’écrivains confirmés. Il semble que l’on puisse rattacher la plupart des manifestations de théâtralité actuelles à une très ancienne institution, évoquée par les “découvreurs occidentaux” de la Polynésie française, la secte des Ariois. Intéressés par cette coutume, les premiers ethnographes William Ellis, J.A. Morenhout et Teuira Henry, n’en demeurent pas moins très circonspects lorsqu’ils la décrivent. Segalen dépeint une troupe itinérante de prêtres et de comédiens, participant activement aux cérémonies religieuses mais donnant aussi des spectacles profanes au ton licencieux et provocateur. On peut faire référence à cette tradition à propos du renouveau du ’Orero, pièce déclamatoire accompagnée d’une pantomime. À l’époque précoloniale, celui-ci était uniquement interprété à l’occasion de représentations collectives mêlant la musique, la danse, le chant, le récit et le mime. Ces sortes d’opéras/ballets ont d’ailleurs survécu jusqu’à nos jours et sont toujours joués pendant le Heiva ou Tiurai devant un public de connaisseurs, les meilleures œuvres étant récompensées par des prix. Cependant le ’Orero a maintenant pris son autonomie et fait même l’objet d’un enseignement dans les collèges du pays. Ces spectacles, ’Orero et œuvres du Heiva sont en reo mā’ohi et prennent généralement pour thème une légende polynésienne. L’utilisation récente d’un thème biblique a été fortement controversée. Par ailleurs, on peut avancer l’hypothèse que les représentations satiriques des Ariois sont à rapprocher de l’engouement suscité par une pièce comique écrite en reo mā’ohi par un membre de l’Académie tahitienne, Maco Tevane, dont le succès ne se dément pas: Mama Roro et Papa Penu. À l’appui de cette hypothèse on peut citer aussi la célébrité durable acquise par l’adaptation en reo mā’ohi du Bourgeois gentilhomme par John Mairai: Te Manu tāne. [End Page 155] Parallèlement à cette veine traditionnelle, un groupe de jeunes gens à l’origine d’une “renaissance culturelle” à Tahiti dans les années 1970, s’est inspiré de la forme occidentale du théâtre pour faire vivre la Maison de la Culture, créée à la même époque (1972), et dynamiser la vie culturelle. Cette entreprise a connu un coup d’arrêt dans les années 1980. En effet, leurs créations pouvaient apparaître subversives aux yeux du pouvoir politique. La mort avant l’heure d’un personnage charisma-tique, Henri Hiro, poète, dramaturge, réalisateur de films, homme engagé, a aussi contribué à mettre en sommeil une création théâtrale par ailleurs fortement dépen-dante des subventions des pouvoirs publics. Les réalisations se partageaient entre adaptations et créations, pour la plupart d’entre ell","PeriodicalId":19369,"journal":{"name":"Nouvelles Études Francophones","volume":"26 1","pages":"0"},"PeriodicalIF":0.0,"publicationDate":"2023-01-01","publicationTypes":"Journal Article","fieldsOfStudy":null,"isOpenAccess":false,"openAccessPdf":"","citationCount":null,"resultStr":null,"platform":"Semanticscholar","paperid":"136002954","PeriodicalName":null,"FirstCategoryId":null,"ListUrlMain":null,"RegionNum":0,"RegionCategory":"","ArticlePicture":[],"TitleCN":null,"AbstractTextCN":null,"PMCID":"","EPubDate":null,"PubModel":null,"JCR":null,"JCRName":null,"Score":null,"Total":0}
{"title":"Fragmentation et reconstruction du moi dans la littérature francophone de la Polynésie française","authors":"Riccardo Pineri","doi":"10.1353/nef.2023.a905926","DOIUrl":"https://doi.org/10.1353/nef.2023.a905926","url":null,"abstract":"Abstract: Cet article met en lumière l’héritage des modèles de la littérature identitaire des auteurs français récents dans la jeune littérature polynésienne francophone, mais également les identités d’emprunt puisées dans la culture indigéniste de l’Amérique latine et de la littérature postcoloniale africaine. Dans Microlectures polynésiennes (2017), le chercheur hongrois Kàroly Sandòr Pallai examine des textes d’écrivains polynésiens récents, les passant au crible de la critique postmoderne de Derrida, Deleuze et Lyotard. Cette rencontre de la critique hypermoderne occidentale et de l’écriture polynésienne est un exemple intéressant de la fabrication identitaire dans les cultures des nations postcoloniales. La fin de l’article évoque Le Sentier semé d’étoiles de Fetia Maucotel (2021), roman d’apprentissage d’un jeune auteur sino-polynésien. En quête du sens de la vie, il s’écarte du nombrilisme de toute une littérature contemporaine et retrouve la figure de l’individu problématique à la recherche de la construction du moi, essentielle dans l’histoire de la littérature, loin des “novlangues” et des indigences identitaires.","PeriodicalId":19369,"journal":{"name":"Nouvelles Études Francophones","volume":"20 1","pages":"0"},"PeriodicalIF":0.0,"publicationDate":"2023-01-01","publicationTypes":"Journal Article","fieldsOfStudy":null,"isOpenAccess":false,"openAccessPdf":"","citationCount":null,"resultStr":null,"platform":"Semanticscholar","paperid":"136003153","PeriodicalName":null,"FirstCategoryId":null,"ListUrlMain":null,"RegionNum":0,"RegionCategory":"","ArticlePicture":[],"TitleCN":null,"AbstractTextCN":null,"PMCID":"","EPubDate":null,"PubModel":null,"JCR":null,"JCRName":null,"Score":null,"Total":0}
{"title":"Nassur Attoumani. Du théâtre satirique aux contes pédagogiques (1992–2022) by Linda Rasoamanana (review)","authors":"Cynthia Volanosy Parfait","doi":"10.1353/nef.2023.a905945","DOIUrl":"https://doi.org/10.1353/nef.2023.a905945","url":null,"abstract":"Reviewed by: Nassur Attoumani. Du théâtre satirique aux contes pédagogiques (1992–2022) by Linda Rasoamanana Cynthia Volanosy Parfait Rasoamanana, Linda. Nassur Attoumani. Du théâtre satirique aux contes pédagogiques (1992–2022). Paris, Les Éditions du Cerf, 2022. ISBN 9782204153270. 210 p. L’espace littéraire indianocéanique se félicite de la parution de l’ouvrage de synthèse sur un des grands écrivains de la zone, le Mahorais Nassur Attoumani. L’ouvrage est signé par Linda Rasoamanana dont les études sérieuses sur l’archipel des Comores et sa littérature19 lui assurent toute légitimité. Les œuvres d’Attoumani ont fait l’objet d’intéressantes publications; trois décennies de création ininterrompue au cœur de la toute jeune littérature mahoraise suscitent forcément l’engouement des universitaires. L’heure est donc à la restitution et l’auteure l’a très bien compris; “d’où cet essai qui vise à mettre en contexte (archipélique et indianocéanique) et en perspective (intertextuelle et réticulaire) trente années de création” (13). L’ouvrage retrace les productions de l’écrivain mahorais de la parution de sa comédie de mœurs, La [End Page 248] Fille du polygame en 1992, jusqu’en 2022 avec ses contes plurilingues déjà publiés ou en cours de publication. Dès l’introduction, l’auteure inscrit à juste titre la création de l’écrivain dans son environnement direct, une création profondément ancrée dans l’archipel d’origine et tournée ouvertement vers les îles-sœurs. Dans la première partie, Rasoamanana propose une notice biographique de l’écrivain en insistant sur les éléments qui ont nourri les premières productions de ce dernier. Cette notice est suivie de repères chronologiques, présentés sous forme de tableaux, qui rappellent les anthologies ainsi que les manuels littéraires où les publications d’écrivains sont immédiatement circonscrites dans des événements socioculturels et politiques. La deuxième partie, “Lectures critiques des œuvres publiées: de 1992–2022,” qui s’étale sur une centaine de pages, constitue le nœud de l’ouvrage. L’auteure double la lecture générique des productions attoumaniennes d’une analyse thématique permettant d’en saisir la portée dans le paysage littéraire de l’océan Indien. Le découpage par genre proposé, “Panorama générique,” est composé d’un résumé ciblé et commenté de chacune des œuvres intelligemment reliées entre elles pour ainsi attester la maturation dans la pratique du genre. Pour rappel, l’écrivain mahorais compte à son actif cinq pièces de théâtre—La Fille du polygame (1992), Le Turban et la capote (1997), Interview d’un macchabée (2000), Entre les mailles du diable (2005), Autopsie d’un macchabée (2009)—et “[a]u fil des parutions,” souligne l’auteure, “le ratio/scènes devient plus maîtrisé, les dialogues plus percutants, le rire plus oblique et subtil” (44). Avec ses premiers romans Le Calvaire des baobabs et Nerf de bœuf, parus en 2000, Attoumani revient, par ailleurs, sur la colonisation et l’esclavagisme. Or, si ","PeriodicalId":19369,"journal":{"name":"Nouvelles Études Francophones","volume":"43 1","pages":"0"},"PeriodicalIF":0.0,"publicationDate":"2023-01-01","publicationTypes":"Journal Article","fieldsOfStudy":null,"isOpenAccess":false,"openAccessPdf":"","citationCount":null,"resultStr":null,"platform":"Semanticscholar","paperid":"136003164","PeriodicalName":null,"FirstCategoryId":null,"ListUrlMain":null,"RegionNum":0,"RegionCategory":"","ArticlePicture":[],"TitleCN":null,"AbstractTextCN":null,"PMCID":"","EPubDate":null,"PubModel":null,"JCR":null,"JCRName":null,"Score":null,"Total":0}
{"title":"Écopoétiques africaines. Une expérience décoloniale des lieux by Xavier Garnier (review)","authors":"Emmanuelle Eymard Traoré","doi":"10.1353/nef.2023.a905936","DOIUrl":"https://doi.org/10.1353/nef.2023.a905936","url":null,"abstract":"Reviewed by: Écopoétiques africaines. Une expérience décoloniale des lieux by Xavier Garnier Emmanuelle Eymard Traoré Garnier, Xavier. Écopoétiques africaines. Une expérience décoloniale des lieux. Paris, Karthala, 2022. ISBN 9782811129941. 264 p. Dans un contexte d’aggravation des crises écologiques qui affectent en particulier les pays des Suds, de nombreuses études philosophiques, sociologiques et littéraires (Blanc, 2008; Collot, 2014; David, 2013; Ferdinand, 2019; Latour, 2017; Collectif ZoneZadir, 2021; Schoentjes, 2015) développent des réflexions depuis la localité et dans le sillage de la sociocritique (Westphal, 2007), proposant de nouvelles perspectives intellectuelles. Dans le domaine de la littérature plus spécifiquement, l’écopoétique renvoie pour sa part au fait “de prêter particulièrement attention aux constructions discursives, énonciatives et narratives des questions environnementales en contexte littéraire” (Defraeye et Lepage 9). Professeur de littérature comparée, Xavier Garnier s’intéresse depuis quelques années à ce domaine, comme l’attestent notamment ses nombreux articles, le dynamisme du collectif universitaire ZoneZadir3 auquel il appartient, ou encore l’ouvrage dont il est ici question. De fait, Écopoétiques africaines se présente comme une somme théorique autant que comme une nouvelle proposition critique à laquelle l’auteur nous enjoint à réfléchir en analysant de nombreux textes africains essentiellement narratifs et poétiques, de Léopold Sédar Senghor à In Koli Jean Bofane. Appréhendées depuis les lieux que les textes campent, les œuvres littéraires s’entendent comme des espaces de résistance qui permettent “de ramener les Modernes sur terre, de les détacher de leur acosmisme, pour les mettre au contact des écosystèmes” (13). En posant un regard chronologique sur un vaste corpus africain, l’universitaire parisien fait état de trois moments qui constituent les trois parties de l’ouvrage. Dans une première partie, Garnier analyse des textes littéraires issus de l’époque coloniale ou juste postérieure, à la “morsure des lieux, cette insurrection écopoétique des lieux sous le glacis impérial” (23), tandis que s’affrontent textes coloniaux, qui figent et folklorisent les lieux, et textes locaux qui entendent les revitaliser. La démonstration concernant l’œuvre de Senghor, notamment Chant d’ombre (1945), [End Page 213] propose une approche renouvelée de la production du chantre de la négritude en l’appréhendant comme “une poésie spirituelle et incarnée” (46), qui tire sa force, son énergie, de ce qui l’entoure, de la nature: “Le lyrisme senghorien est tactile, c’est un flux qui enveloppe la réalité pour en extraire, par friction, de précieuses pail-lettes/Le lyrisme senghorien est donc d’abord un vertige” (46). Ces “paillettes” peuvent être réinvesties au présent et régénérer l’avenir, tandis que l’on touche du doigt ce que le lyrisme de Senghor transmet. Or, selon le chercheur, le toucher est le sens caractéristique des ","PeriodicalId":19369,"journal":{"name":"Nouvelles Études Francophones","volume":"20 1","pages":"0"},"PeriodicalIF":0.0,"publicationDate":"2023-01-01","publicationTypes":"Journal Article","fieldsOfStudy":null,"isOpenAccess":false,"openAccessPdf":"","citationCount":null,"resultStr":null,"platform":"Semanticscholar","paperid":"136003166","PeriodicalName":null,"FirstCategoryId":null,"ListUrlMain":null,"RegionNum":0,"RegionCategory":"","ArticlePicture":[],"TitleCN":null,"AbstractTextCN":null,"PMCID":"","EPubDate":null,"PubModel":null,"JCR":null,"JCRName":null,"Score":null,"Total":0}
{"title":"Jacques Audiard by Gemma King (review)","authors":"Erin Tremblay Ponnou-Delaffon, Erin Tremblay Ponnou-Delaffon","doi":"10.1353/nef.2023.a905940","DOIUrl":"https://doi.org/10.1353/nef.2023.a905940","url":null,"abstract":"Reviewed by: Jacques Audiard by Gemma King Erin Tremblay Ponnou-Delaffon and Erin Tremblay Ponnou-Delaffon King, Gemma. Jacques Audiard. Manchester, Manchester UP, 2021. French Film Directors Series. ISBN 9781526133007. 188 p. Première monographie consacrée au célèbre réalisateur, scénariste et producteur français, Jacques Audiard de Gemma King représente une contribution substantielle aux études cinématographiques. L’ouvrage poursuit la tendance—observée tant dans les travaux antérieurs de l’auteure que dans ce domaine de recherche en général—qui s’attache à décentrer la France et le cinéma national dans le but de privilégier une perspective transnationale. D’ailleurs, l’inclusion de ce volume dans la série “French Film Directors” s’avère intéressante car, comme l’auteure nous le démontre, l’œuvre d’Audiard englobe et dépasse, voire problématise, à la fois les trois termes, “français,” “film” et “réalisateurs.” La démarche de King s’inspire du cinéma d’Audiard, prenant les limites, les barrières et les frontières—ainsi que leur traversée, leur transgression et leur démantèlement—comme motif central et comme élément structurant du livre. Selon sa thèse, appuyée avec brio, l’art d’Audiard serait un cinéma qui “dépasse les frontières” (5),4 et ce sur plusieurs plans: thématique, esthétique, linguistique, genré, socioculturel, générique, théorique et national. Ainsi, Audiard et ses films occupentils une position double et parfois paradoxale qui renforce et repense en même temps nos catégories traditionnelles: Situés quelque part entre les films d’art et d’essai et ceux de la série B, le français et le transnational, le féministe et le patriarcal, le familier et l’innovant, les personnages et les films de Jacques Audiard sont à l’image de sa posture toujours changeante, insaisissable, à la fois au sein et au-delà de l’imaginaire du cinéma français. (160)5 L’analyse se décline en trois chapitres principaux: “Body” (corps), “Society” (Société) “Globe” (Globe). Cette progression du plus intime au plus mondial permet à King de souligner la variété ainsi que les enjeux des lignes physiques et symboliques transgressées dans et par le corpus d’Audiard. Chaque chapitre interroge deux ou trois longs métrages réalisés par le cinéaste, tout en se montrant attentif à son travail en tant que scénariste, producteur, monteur et ingénieur du son, ainsi [End Page 228] qu’à ses projets mineurs comme ses clips. (Paru en 2021, l’ouvrage ne tient pas compte de son dernier film, Les Olympiades (2021), co-écrit avec Céline Sciamma et Léa Mysius.) Dans l’introduction, l’auteure insiste sur la centralité des corps traumatisés et vulnérables chez Audiard. Elle contextualise son corpus en termes d’influences (notamment familiale), de collaborations et d’engagements (notamment sa participation au Club des 13 et au Collectif des cinéastes pour les sans-papiers). Elle y survole également les grandes lignes de sa filmographie. Cette introduction fait donc ressortir d’emblée une te","PeriodicalId":19369,"journal":{"name":"Nouvelles Études Francophones","volume":"15 1","pages":"0"},"PeriodicalIF":0.0,"publicationDate":"2023-01-01","publicationTypes":"Journal Article","fieldsOfStudy":null,"isOpenAccess":false,"openAccessPdf":"","citationCount":null,"resultStr":null,"platform":"Semanticscholar","paperid":"136003169","PeriodicalName":null,"FirstCategoryId":null,"ListUrlMain":null,"RegionNum":0,"RegionCategory":"","ArticlePicture":[],"TitleCN":null,"AbstractTextCN":null,"PMCID":"","EPubDate":null,"PubModel":null,"JCR":null,"JCRName":null,"Score":null,"Total":0}
{"title":"Notes sur Nicolas Kurtovitch et Good Night Friend : Culture kanak, traumatismes et reconstitution de la tradition","authors":"Jean Bessière","doi":"10.1353/nef.2023.a905928","DOIUrl":"https://doi.org/10.1353/nef.2023.a905928","url":null,"abstract":"Notes sur Nicolas Kurtovitch et Good Night FriendCulture kanak, traumatismes et reconstitution de la tradition Jean Bessière (bio) Le bref roman de Nicolas Kurtovitch, Good Night Friend (2006), peut certainement être lu suivant une ligne organisatrice et quasiment argumentative nette: dans la société kanak de la Nouvelle-Calédonie, un mari tue l’homme qui a très largement importuné sa femme, laquelle dépérit à la suite d’un sort jeté par celui-ci. Le mari est lui-même tué par un membre de la famille de cet homme, faute d’avoir observé les règles de la demande de pardon kanak. De plus, la fille du premier meur-trier subit des violences de genre, dirait-on dans un vocabulaire que n’utilise pas Kurtovitch, alors qu’elle recherche son frère aîné, seul capable d’éviter le meurtre du Père. Dila, l’épouse victime du sort jeté, trouve en conclusion du récit, après la mort de son mari, un rôle essentiel dans l’illustration du pouvoir de la tradition culturelle. Ce pouvoir peut être celui de donner un plein droit de cité à la femme; elle reçoit ce plein droit de cité et symbolise ultimement le lien tribal, le lien avec la nature, le lien avec le temps. Elle devient une sorte de vaste figure herméneutique, parfaite médiation de l’interprétation de tout ce qui s’est passé dans le roman. Cette conclusion soulève un dernier point remarquable: cette femme reçoit ce pouvoir d’un vieillard, isolé dans la montagne, figure de la lignée des chefs de la tribu à laquelle ont appartenu le père et les ancêtres de son mari, premier meurtrier. Loin d’être exhaustif, ce résumé de l’intrigue comporte des blancs à cause de sa simplicité et des silences du roman même. On ne sait pas comment on va du mari meurtrier et finalement tué à cette place centrale ultimement prêtée à sa femme, dans l’isolement, faut-il ajouter. On ne le sait pas parce qu’il n’est jamais prêté, sauf à la conclusion, une parole explicative à cette femme. Viennent s’ajouter d’autres omissions: aussi explicites que soient les liens familiaux, ou apparentés à la famille centrale du roman, les rapports entre les personnages, certes souvent manifestes, ne sont pas toujours exactement précisés. Cela traduit une sorte d’égalité de ces personnages dans l’énonciation ou dans le fil narratif du roman. Comme s’impose la question de la parole explicative de la mère, s’impose aussi pour le lecteur de connaître la raison de ce traitement égal des personnages, qui conduit à une difficile identification des énonciateurs de tel ou tel passage. [End Page 148] À rebours de ces questions implicitement attachées au récit, le roman pose expressément, par le biais des personnages du père et de sa fille Léa, la question du changement de nom de cette famille; un changement d’abord tenu pour révélateur d’une faute: les ancêtres avaient pris le parti des colonisateurs et changé de nom, rompant le lien à la terre (63). Si tel est le souvenir du passé de la famille, le lien à la tradition est perdu. Le roman de Kurtovitch n’a plus m","PeriodicalId":19369,"journal":{"name":"Nouvelles Études Francophones","volume":"72 2 1","pages":"0"},"PeriodicalIF":0.0,"publicationDate":"2023-01-01","publicationTypes":"Journal Article","fieldsOfStudy":null,"isOpenAccess":false,"openAccessPdf":"","citationCount":null,"resultStr":null,"platform":"Semanticscholar","paperid":"136003171","PeriodicalName":null,"FirstCategoryId":null,"ListUrlMain":null,"RegionNum":0,"RegionCategory":"","ArticlePicture":[],"TitleCN":null,"AbstractTextCN":null,"PMCID":"","EPubDate":null,"PubModel":null,"JCR":null,"JCRName":null,"Score":null,"Total":0}
{"title":"Geometry and Jean Genet: Shaping the Subject by Joanne Brueton (review)","authors":"Chloé Vettier","doi":"10.1353/nef.2023.a905941","DOIUrl":"https://doi.org/10.1353/nef.2023.a905941","url":null,"abstract":"Reviewed by: Geometry and Jean Genet: Shaping the Subject by Joanne Brueton Chloé Vettier Brueton, Joanne. Geometry and Jean Genet: Shaping the Subject. Cambridge (UK), Modern Humanities Research Association, 2022. ISBN 9781781884522. 181 p. Avec Geometry and Jean Genet: Shaping the Subject (2022), Joanne Brueton s’inscrit dans un courant de la critique littéraire inspiré de la “French Theory.” Celleci constitue d’ailleurs un thème capital de l’ouvrage, à tel point que, comme le suggère le titre, Jean Genet s’en trouve parfois relégué à une place secondaire. De fait, Brueton travaille avec une égale énergie à souligner l’importance qu’occupent [End Page 231] les formes géométriques dans les écrits de Genet ainsi que dans ceux de Roland Barthes, Hélène Cixous, Jacques Derrida, Gilles Deleuze et Félix Guattari, Michel Foucault, ou encore Jean-Luc Nancy. En lisant ces textes côte à côte, elle rend compte de l’objet impossible que constitue la subjectivité selon Genet, celle-ci ne se laissant jamais appréhender par des unités métriques ou des normes établies. Plus précisément, les formes géométriques qui constellent l’œuvre de Genet dessinent un sujet solitaire et irréductible (avec le point), à la fois affilié et fuyant (avec la ligne), échappant à toute orientation prédéterminée (avec la diagonale), et qui demeure libre malgré les tentatives d’enfermement (avec la grille et le cercle). Faisant chacune l’objet d’un chapitre, ces figures reflètent paradoxalement l’instabilité et l’incertitude caractéristiques du sujet selon Genet. Le premier chapitre est consacré au point, soit “là où la géométrie commence” selon Brueton (13).11 Défini par Euclide comme “ce qui n’a pas de parties” (13),12 le point représente chez Genet l’isolement et l’inaccessibilité du sujet. Le person-nage appelé “Lou-du-Point-du-Jour,” que le narrateur de Miracle de la Rose dépeint comme “le plus isolé de nous par son nom” (Genet, Miracle 238) incarne, à titre d’exemple, cette singularité irréductible qui caractérise le point géométrique. Dans son fonctionnement, le point genétien offre une version textuelle du punctum de Barthes, en ce qu’il constitue “ce hasard qui [. . .] me point (mais aussi me meurtrit, me poigne)” (Barthes 809). Mais si la radicale subjectivité des personnages genétiens suscite chez la lectrice un rapprochement affectif, elle est aussi ce qui la tient à distance. Chez Genet, ce qui poigne est tout autant insaisissable, le point genétien opérant de façon ambiguë: il pique notre intérêt en même temps qu’il le blesse. Pour Genet, la rencontre avec l’autre constitue d’ailleurs une blessure pour le moi. Telles les stigmata de Cixous, le point genétien perfore le langage tout en rendant la blessure lisible, de telle sorte qu’avec Genet, “on entre en littérature par lésion” (Cixous s.p.). Car la blessure permet de s’identifier aux personnages, d’atteindre, comme le dit Genet dans L’Atelier d’Alberto Giacometti, “ce point précieux où l’être humain serait ramené à c","PeriodicalId":19369,"journal":{"name":"Nouvelles Études Francophones","volume":"75 1","pages":"0"},"PeriodicalIF":0.0,"publicationDate":"2023-01-01","publicationTypes":"Journal Article","fieldsOfStudy":null,"isOpenAccess":false,"openAccessPdf":"","citationCount":null,"resultStr":null,"platform":"Semanticscholar","paperid":"136003155","PeriodicalName":null,"FirstCategoryId":null,"ListUrlMain":null,"RegionNum":0,"RegionCategory":"","ArticlePicture":[],"TitleCN":null,"AbstractTextCN":null,"PMCID":"","EPubDate":null,"PubModel":null,"JCR":null,"JCRName":null,"Score":null,"Total":0}