{"title":"Porosités du moi dans deux romans du Pacifique francophone: Le Roi absent et Quintet","authors":"Sylvie André","doi":"10.1353/nef.2023.a905919","DOIUrl":"https://doi.org/10.1353/nef.2023.a905919","url":null,"abstract":"Abstract: Les deux romans analysés, Le Roi absent du Polynésien Moetai Brotherson, publié en 2007, et Quintet du Caldoche Frédéric Ohlen, paru en 2014, reconstituent des sagas familiales et, pour le premier, rejoint parfois la biographie de l’auteur. Au-delà de leurs différences et à travers les intrigues entremêlées, les auteurs se livrent à une réévaluation des diverses instances du moi, telles que définies par la culture occidentale, notamment le moi rationnel, l’enveloppe corporelle, le rapport à la nature, la relation à la langue maternelle, marqueur identitaire par excellence depuis le 19e siècle. Il ne s’agit pas, pour les deux romanciers, de les rejeter ou de les adopter absolument, mais plutôt de tenter de “composer un monde commun,” selon l’expression de l’anthropologue Bruno Latour.","PeriodicalId":19369,"journal":{"name":"Nouvelles Études Francophones","volume":"36 1","pages":"0"},"PeriodicalIF":0.0,"publicationDate":"2023-01-01","publicationTypes":"Journal Article","fieldsOfStudy":null,"isOpenAccess":false,"openAccessPdf":"","citationCount":null,"resultStr":null,"platform":"Semanticscholar","paperid":"136002952","PeriodicalName":null,"FirstCategoryId":null,"ListUrlMain":null,"RegionNum":0,"RegionCategory":"","ArticlePicture":[],"TitleCN":null,"AbstractTextCN":null,"PMCID":"","EPubDate":null,"PubModel":null,"JCR":null,"JCRName":null,"Score":null,"Total":0}
{"title":"L’Université de Saint-Boniface. 200 ans d’évolution du premier établissement d’enseignement supérieur de l’Ouest canadien by Michel Verrette (review)","authors":"Dominique Laporte","doi":"10.1353/nef.2023.a905938","DOIUrl":"https://doi.org/10.1353/nef.2023.a905938","url":null,"abstract":"Reviewed by: L’Université de Saint-Boniface. 200 ans d’évolution du premier établissement d’enseignement supérieur de l’Ouest canadien by Michel Verrette Dominique Laporte Verrette, Michel, avec la collaboration de Carole Pelchat et Ndeye Rokhaya Gueye. L’Université de Saint-Boniface. 200 ans d’évolution du premier établissement d’enseignement supérieur de l’Ouest canadien. Winnipeg, Éditions des Plaines, 2022. ISBN 9782896118236. 367 p. Fondée par Annette Saint-Pierre et Georges Damphousse en 1979 à Saint-Boniface, dans la province du Manitoba au Canada, les Éditions des Plaines est la troisième maison d’édition francophone de l’Ouest canadien à avoir été créée, après la création des Éditions du Blé et des Éditions Bois-Brûlés en 1974. “[Quarante] ans d’audace littéraire dans l’Ouest canadien,” peut-on lire sur le site Internet des Éditions [End Page 220] des Plaines (plaines.ca). De l’audace, il en a fallu en effet à sa co-fondatrice et à son partenaire d’affaires, ainsi qu’aux personnes leur ayant succédé pour que les Éditions des Plaines deviennent une entreprise francophone viable et reconnue dans une région canadienne majoritairement anglophone. Divisé en trois catégories (Peuples autochtones, Jeunesse, Littérature adulte), le catalogue des Éditions des Plaines s’est enrichi de livres d’histoire, sous l’impulsion d’Annette Saint-Pierre, autrice et cofondatrice du Centre d’études franco-canadiennes de l’Ouest (CEFCO) au Collège de Saint-Boniface, appelé le Collège universitaire de Saint-Boniface (CUSB), de 2003 à 2011, avant de devenir définitivement l’Université de Saint-Boniface (USB), en vertu d’une loi provinciale adoptée en 2011. La publication de L’Université de Saint-Boniface à la maison d’édition cofondée par la pionnière des études sur l’Ouest franco-canadien au Collège de Saint-Boniface est une heureuse coïncidence qui comble l’attente que la célébration du bicentenaire de cet établissement d’enseignement en 2018 a suscitée. Des sources secondaires antérieures évoquent une partie de l’histoire du Collège de Saint-Boniface (Bernier, 1945; Gaudreau et Verrette, 1994; Jolicœur, 1985; Pelchat, 2008; Régnier, 1964; Verrette, 1994 et 2011), mais n’atteignent pas l’ampleur de la synthèse réalisée par Michel Verrette dans son livre et nourrie de son expérience de professeur d’histoire à l’USB de 1989 à 2017. Rédigée dans un style clair et accessible au grand public, cette étude historique est divisée commodément en trois chapitres couvrant respectivement la période de gestation du Collège de Saint-Boniface (1818–1885), celle de sa direction par des Jésuites (1885–1967), et celle de sa laïcisation et de sa modernisation à partir de 1967. Les chapitres sont organisés en modules (structures administratives et organisationnelles, bâtiments, finances, population étudiante, programmes d’études, personnel), ce qui donne une vue globale de l’institution au cours de chacune des périodes de son histoire. Des renseignements biographiques et des infor","PeriodicalId":19369,"journal":{"name":"Nouvelles Études Francophones","volume":"68 1","pages":"0"},"PeriodicalIF":0.0,"publicationDate":"2023-01-01","publicationTypes":"Journal Article","fieldsOfStudy":null,"isOpenAccess":false,"openAccessPdf":"","citationCount":null,"resultStr":null,"platform":"Semanticscholar","paperid":"136003162","PeriodicalName":null,"FirstCategoryId":null,"ListUrlMain":null,"RegionNum":0,"RegionCategory":"","ArticlePicture":[],"TitleCN":null,"AbstractTextCN":null,"PMCID":"","EPubDate":null,"PubModel":null,"JCR":null,"JCRName":null,"Score":null,"Total":0}
{"title":"French Studies in Southern Africa by Laude Ngadi Maïssa et al (review)","authors":"Alioune Sow","doi":"10.1353/nef.2023.a905937","DOIUrl":"https://doi.org/10.1353/nef.2023.a905937","url":null,"abstract":"Reviewed by: French Studies in Southern Africa by Laude Ngadi Maïssa et al Alioune Sow Maïssa, Laude Ngadi, Markus Arnold, Bernard De Meyer et Emmanuel Mbégane Ndour, coordonnateurs. “Les Manifestes littéraires et artistiques d’Afrique subsaharienne: formes et enjeux.” French Studies in Southern Africa, vol. 51, no 1, 2021. ISSN 02590247. 188 p. Coordonné par Laude Ngadi Maïssa, Markus Arnold, Bernard De Meyer et Emmanuel Mbégane Ndour, le numéro 51.1 de la revue French Studies in Southern Africa présente une étude inédite et stimulante des manifestes littéraires et artistiques sur le continent. Les réflexions proposées se veulent le prolongement de plusieurs “numéros spéciaux du journal” consacrés à l’édition en Afrique (3) mais surtout à l’examen de “textes manifestaires” (4) toujours plus nombreux, pour mettre “en lumière les transformations structurelles du genre ainsi que celles des groupes littéraires et artistiques qui l’utilisent et le (re)pensent” (4). Partant de l’“Introduction à l’analyse des manifestes” de Claude Abastado (1980), l’avant-propos du numéro revient sur les définitions du manifeste. Ainsi, il est rappelé que le manifeste est un “genre hétéroclite” et “multiforme” qui ne cesse d’animer l’histoire littéraire africaine. Essentiel dans “la construction des champs ou des institutions littéraires,” le genre littéraire et son étude permettent d’appréhender “l’évolution historique des littératures” (2) en mettant en évidence des figures, des dynamiques et des pratiques inattendues. Selon les auteurs, “les textes manifestaires” se définissent suivant des processus et caractéristiques “rhétoriques,” [End Page 216] “thématiques et discursifs,” “esthétiques” et “sociologiques” (4) dont la finalité est “la production d’un discours qui sert à contester des traditions et des normes afin de revendiquer des pratiques nouvelles et des codes originaux présentés comme distinctifs/représentatifs d’une modernité et davantage en phase avec le contempo-rain” (1). Les contributions du numéro confirment que les contestations et les revendications des “textes manifestaires” sont diverses avec, cependant, quelques prédominances: le refus des relations hégémoniques entre la France et l’Afrique héritées de la colonisation (4), la réflexion sur les courants de pensée sur le continent progressivement réformés par “les circulations fluides” et la mobilité (5), les questionnements sur la condition d’auteur ou encore les interrogations sur la mission des hommes de lettres africains (6). L’étude permet de vérifier que si le genre littéraire conserve une place privilégiée dans l’histoire de la littérature africaine, c’est qu’il est sollicité par des auteurs qui, depuis Batouala de René Maran (1921) jusqu’au Dictionnaire enjoué des cultures africaines d’Alain Mabanckou et Abdourahman Waberi (2019), exploitent la valeur et les possibilités que le manifeste peut offrir. Chaque contribution confirme que les “pratiques manifestaires” sont disséminées sur le conti","PeriodicalId":19369,"journal":{"name":"Nouvelles Études Francophones","volume":"2021 1","pages":"0"},"PeriodicalIF":0.0,"publicationDate":"2023-01-01","publicationTypes":"Journal Article","fieldsOfStudy":null,"isOpenAccess":false,"openAccessPdf":"","citationCount":null,"resultStr":null,"platform":"Semanticscholar","paperid":"136003163","PeriodicalName":null,"FirstCategoryId":null,"ListUrlMain":null,"RegionNum":0,"RegionCategory":"","ArticlePicture":[],"TitleCN":null,"AbstractTextCN":null,"PMCID":"","EPubDate":null,"PubModel":null,"JCR":null,"JCRName":null,"Score":null,"Total":0}
{"title":"Cahiers Robinson by Justine Breton (review)","authors":"Suzanne Pouliot, Suzanne Pouliot","doi":"10.1353/nef.2023.a905943","DOIUrl":"https://doi.org/10.1353/nef.2023.a905943","url":null,"abstract":"Reviewed by: Cahiers Robinson by Justine Breton Suzanne Pouliot and Suzanne Pouliot Breton, Justine, coordonatrice. “Ces petites filles qui lisent.” Cahiers Robinson, no 51, 2022. ISBN 9782848325347. 191 p. Justine Breton identifie des personnages de lectrices dans plusieurs romans. De fait, ce qui les caractérise, précise Breton, c’est la relation privilégiée qu’elles entretiennent avec les livres (7–8). Nous n’avons retenu que les articles qui représentent des lectrices dans les albums et les romans. Dans le premier article, Florence Casulli trace le portrait d’une lectrice idéale en étudiant les enjeux intertextuels et métatextuels dans Mathilda de Roald Dahl (9–20). La protagoniste incarne, aux dires de Breton, l’apothéose du projet pédagogique de l’auteur dont l’objectif était de faire lire les enfants. Comment Dahl s’y est-il pris? Inspirée du décryptage métatextuel du roman intitulé James et la pêche géante, Casulli passe en revue l’œuvre de Dahl et y décèle une conception métatextuelle des héros. C’est ainsi que le roman Danny le champion du monde inciterait les enfants à voyager à travers les livres pour se forger une identité. L’hymne à la lecture se poursuit avec la dernière héroïne de Dahl, Mathilda. La liste des livres lus par ce personnage crée une mise en abyme qui valorise l’acte de lecture, tout en constituant “un moyen de façonner un sens aigu de la justice” (17). En outre, le roman laisse entrevoir la confiance que l’auteur accorde aux passeurs culturels que sont les enseignants qui transmettent l’amour de la connaissance et de la littérature à leurs élèves. Marie-France Burgain s’intéresse, pour sa part, à “Hermione Granger ou les multiples facettes de l’héroïne lectrice du monde de Harry Potter” (21–32). La protagoniste qui passe son temps à la bibliothèque, lieu stratégique de rencontres, lit pour apprendre, certes, mais aussi pour comprendre le monde qui l’entoure. En outre, ses lectures lui permettent de lutter contre les maléfices qui les entourent, elle et ses amis. Alter ego de l’autrice Rowling, Hermione “montre au lecteur qu’un livre de fiction peut l’aider à découvrir les clés d’un univers qu’il ne comprend pas . . .” (29). Au-delà des fonctions incarnées par Hermione au sein de la diégèse, Rowling apprend aux lecteurs, par son intermédiaire, à être critiques et attentifs aux moindres détails. Une autre héroïne littéraire et modèle d’identification est incontestablement Jo March, personnage du roman Little Women (en français, Les Quatre filles du docteur March), paru en 1868, de l’Américaine Louisa May Alcott (33–42). Selon Priscille Croce, la lecture et l’écriture sont pour Jo March des lieux de libération. De nombreuses références littéraires attestent de l’importance des livres dans le roman et dans la vie de Jo en particulier. L’amour inconditionnel de Jo pour la lecture et l’écriture lui permet de se distinguer, d’être active, indépendante et de gagner sa vie. [End Page 241] Dans les romans À la croisée des mond","PeriodicalId":19369,"journal":{"name":"Nouvelles Études Francophones","volume":"19 1","pages":"0"},"PeriodicalIF":0.0,"publicationDate":"2023-01-01","publicationTypes":"Journal Article","fieldsOfStudy":null,"isOpenAccess":false,"openAccessPdf":"","citationCount":null,"resultStr":null,"platform":"Semanticscholar","paperid":"136003167","PeriodicalName":null,"FirstCategoryId":null,"ListUrlMain":null,"RegionNum":0,"RegionCategory":"","ArticlePicture":[],"TitleCN":null,"AbstractTextCN":null,"PMCID":"","EPubDate":null,"PubModel":null,"JCR":null,"JCRName":null,"Score":null,"Total":0}
{"title":"“Des mots sur des maux”: L’Identité polynésienne à l’épreuve du traumatisme chez Titaua Peu dans Mutismes et Pina","authors":"Sonia Félix-Naix","doi":"10.1353/nef.2023.a905922","DOIUrl":"https://doi.org/10.1353/nef.2023.a905922","url":null,"abstract":"Abstract: À partir des traumatismes, passés et présents, collectifs et individuels, Titaua Peu décrit une identité polynésienne traumatisée et fragmentée, loin du cliché paradisiaque hérité des récits des premiers explorateurs. Les récits de Mutismes et de Pina s’articulent autour du traumatisme des violences au sein de la société polynésienne: violence intrafamiliale et violence institutionnelle, violence héritée de la colonisation qui se mue en colère. Peu dépeint une société tahitienne fragmentée, rongée par des différends qui semblent irréconciliables. Face au traumatisme de la violence, le peuple polynésien s’est enfermé dans le silence: l’écriture de Peu vise ainsi à redonner au peuple polynésien les mots qu’il avait perdus, des mots qui semblent seuls capables d’apaiser un moi en quête de (re)construction. Se dessine finalement le portrait d’une identité polynésienne contemporaine née de la souffrance et de la douleur, mais forte aussi d’une résilience inébranlable, qui fait résonner l’expérience polynésienne comme une expérience universelle.","PeriodicalId":19369,"journal":{"name":"Nouvelles Études Francophones","volume":"68 1","pages":"0"},"PeriodicalIF":0.0,"publicationDate":"2023-01-01","publicationTypes":"Journal Article","fieldsOfStudy":null,"isOpenAccess":false,"openAccessPdf":"","citationCount":null,"resultStr":null,"platform":"Semanticscholar","paperid":"136002943","PeriodicalName":null,"FirstCategoryId":null,"ListUrlMain":null,"RegionNum":0,"RegionCategory":"","ArticlePicture":[],"TitleCN":null,"AbstractTextCN":null,"PMCID":"","EPubDate":null,"PubModel":null,"JCR":null,"JCRName":null,"Score":null,"Total":0}
{"title":"Les Heures italiques de Nicolas Kurtovitch: Autofiction, polyphonie et universalisme","authors":"Sandrine Joelle Eyang Eyeyong","doi":"10.1353/nef.2023.a905921","DOIUrl":"https://doi.org/10.1353/nef.2023.a905921","url":null,"abstract":"Abstract: Caldoche, c’est-à-dire descendant de colons en Nouvelle-Calédonie, Nicolas Kurtovitch reconnaît la légitimité du peuple kanak en tant que peuple premier de l’archipel. Conscient de l’évolution sociopolitique de la société néocalédonienne, Kurtovitch s’inscrit dans la mouvance des écrivains du Pacifique qui tentent de dépasser les clivages identitaires pour créer les conditions d’un destin commun, dans un même pays. Son roman, Les Heures italiques (2009), relève à certains égards de l’écriture de l’autofiction. À travers l’analyse des trajectoires et des monologues des personnages, nous tenterons de mettre en évidence l’idée d’un processus de (re)construction du moi, qui fait sens et porte un espoir: au-delà des luttes collectives, l’essentiel est de chercher à devenir individuellement un être humain meilleur et juste. L’auteur esquisse une pensée universaliste, qui s’appuie sur les philosophies asiatiques et repose sur une exigence éthique, qui demeure un plaidoyer pour le vivre-ensemble.","PeriodicalId":19369,"journal":{"name":"Nouvelles Études Francophones","volume":"65 1","pages":"0"},"PeriodicalIF":0.0,"publicationDate":"2023-01-01","publicationTypes":"Journal Article","fieldsOfStudy":null,"isOpenAccess":false,"openAccessPdf":"","citationCount":null,"resultStr":null,"platform":"Semanticscholar","paperid":"136002948","PeriodicalName":null,"FirstCategoryId":null,"ListUrlMain":null,"RegionNum":0,"RegionCategory":"","ArticlePicture":[],"TitleCN":null,"AbstractTextCN":null,"PMCID":"","EPubDate":null,"PubModel":null,"JCR":null,"JCRName":null,"Score":null,"Total":0}
{"title":"La Poétique de la cale: variations sur le bateau négrier by Fabienne Kanor (review)","authors":"Linsey Sainte-Claire","doi":"10.1353/nef.2023.a905939","DOIUrl":"https://doi.org/10.1353/nef.2023.a905939","url":null,"abstract":"Reviewed by: La Poétique de la cale: variations sur le bateau négrier by Fabienne Kanor Linsey Sainte-Claire Kanor, Fabienne. La Poétique de la cale: variations sur le bateau négrier. Paris, Payot & Rivages, 2022. ISBN 9782743657819. 240 p. Le texte transdisciplinaire et plurivocal de Fabienne Kanor, Poétique de la cale, se place dans la lignée des questionnements incontournables et intarissables relatifs à la “trace,” à la “marche” et à l’“hérédité” (Unter Ecker s.p.), qui occupent le répertoire de l’auteure. L’ouvrage reflète d’ailleurs parfaitement le profil interdisciplinaire de Kanor—écrivaine, réalisatrice, traductrice et professeure—tant par son analyse fine de multiples productions cinématographiques, littéraires et artistiques, que par son contenu autobiographique. La “trace” que l’auteure tente ici de déceler est celle de la cale du vaisseau négrier, ce vestige spectral qui n’offre qu’un savoir lacunaire, notamment dans le contexte d’une quête difficile accentuée par la pénurie d’archives écrites, audiovisuelles et iconographiques. Pour autant, la “marche” entreprise par Kanor est adroitement théorisée. En convoquant la langue créole, l’auteure parle de chimen chyen, à savoir, ce cheminement sinueux et obscur qu’elle dit emprunter pour assurer auprès de ses lecteurs la transmission des récits sur l’esclavage et les traites négrières dont elle fut investie en Afrique de l’Ouest, en Amérique, aux Antilles françaises et en France. Cette démarche, qui puise sa source dans l’“hérédité,” s’attache par ailleurs à souligner aussi bien la blès des descendants des peuples déportés—violente blessure transgénérationnelle issue de la cale et qui hante désormais leur âme et leur corps—que la manière dont ces blessés s’en guérissent grâce à l’art et à l’imaginaire. [End Page 224] Bien que Kanor éloigne de prime abord son texte des domaines scientifiques et des discours dits savants, son caractère encyclopédique et son érudition ne s’en font pas moins ressentir. De fait, les fondements conceptuels et méthodologiques de l’approche poétique de Kanor au sujet de la cale trouvent tout leur sens lorsqu’on comprend que le retour vers “la cale [qui] est et n’est pas” se fait ici principalement “en pensée” (14). L’aspect poétique du texte se manifeste jusque dans le paratexte qui adopte un ton symbolique (“Carte des quatre-chemins,” “Méditations préliminaires,” “Chemins,” “Terminaisons” et “Héritages”). Kanor utilise aisément, par ailleurs, maintes figures de style, telles que la personnification, la métonymie, le parallélisme et la répétition, qui font honneur au titre de son ouvrage. Enfin, l’auteure rythme son texte d’entretiens menés auprès de divers artistes et conservateurs de musées, tout en énonçant maintes questions rhétoriques qui soulignent sa vision critique et poussent le lecteur à réfléchir à ce qu’elle nomme “la Catastrophe” (13). Kanor débute son cheminement avec quatre “méditations préliminaires” qui contextualisent la pénurie de l’histoire de","PeriodicalId":19369,"journal":{"name":"Nouvelles Études Francophones","volume":"14 1","pages":"0"},"PeriodicalIF":0.0,"publicationDate":"2023-01-01","publicationTypes":"Journal Article","fieldsOfStudy":null,"isOpenAccess":false,"openAccessPdf":"","citationCount":null,"resultStr":null,"platform":"Semanticscholar","paperid":"136002951","PeriodicalName":null,"FirstCategoryId":null,"ListUrlMain":null,"RegionNum":0,"RegionCategory":"","ArticlePicture":[],"TitleCN":null,"AbstractTextCN":null,"PMCID":"","EPubDate":null,"PubModel":null,"JCR":null,"JCRName":null,"Score":null,"Total":0}
{"title":"Panorama de la critique littéraire grand public en Nouvelle-Calédonie: Vers la construction d’une pluralité d’identités auctoriales océaniennes?","authors":"Jean-François Vernay","doi":"10.1353/nef.2023.a905927","DOIUrl":"https://doi.org/10.1353/nef.2023.a905927","url":null,"abstract":"Abstract: La critique joue un rôle essentiel dans la vie littéraire d’un pays, à plus forte raison si elle se fait rare ou si les espaces qui lui sont consacrés se réduisent à une peau de chagrin. La pandémie du coronavirus n’a fait qu’aggraver cette situation indigente à telle enseigne qu’il devient nécessaire de tirer le bilan des trente dernières années de vie culturelle en Nouvelle-Calédonie. Une évaluation métacritique diachronique de la critique littéraire à large diffusion est donc de circonstance. Après l’examen du regard que posent les chercheurs et les historiens en littérature, suivi d’un passage en revue de la presse culturelle néo-calédonienne des trente dernières années, on conclura cet article par un tour d’horizon des diverses plateformes médiatiques qui promeuvent la littérature néo-calédonienne. La recherche mettra en lumière l’intrication des constructions identitaires et littéraires et déterminera les conséquences du resserrement de l’espace critique et politique sur l’identité des écrivains du Caillou.","PeriodicalId":19369,"journal":{"name":"Nouvelles Études Francophones","volume":"52 1","pages":"0"},"PeriodicalIF":0.0,"publicationDate":"2023-01-01","publicationTypes":"Journal Article","fieldsOfStudy":null,"isOpenAccess":false,"openAccessPdf":"","citationCount":null,"resultStr":null,"platform":"Semanticscholar","paperid":"136003154","PeriodicalName":null,"FirstCategoryId":null,"ListUrlMain":null,"RegionNum":0,"RegionCategory":"","ArticlePicture":[],"TitleCN":null,"AbstractTextCN":null,"PMCID":"","EPubDate":null,"PubModel":null,"JCR":null,"JCRName":null,"Score":null,"Total":0}
{"title":"(Re)créations du moi dans la littérature francophone du Pacifique contemporain","authors":"Carole Atem","doi":"10.1353/nef.2023.a905917","DOIUrl":"https://doi.org/10.1353/nef.2023.a905917","url":null,"abstract":"(Re)créations du moi dans la littérature francophone du Pacifique contemporain Carole Atem (bio) L’année 2023 marque, en Polynésie française, un tournant politique et social dont il appartiendra à l’avenir de préciser la nature exacte, ainsi que la portée et l’impact réels en matière de devenir collectif, de gouvernance publique et d’évolution des modes de pensée individuelle; perçue par certains comme une promesse de renouveau de la vie autochtone contemporaine, l’élection du parti indépendantiste à la tête du Pays1 en mai, après l’obtention de la totalité des sièges de députés à l’Assemblée nationale quelques mois auparavant, signale, pour d’autres, une volonté populaire de revendication identitaire et culturelle aux contours et aux objectifs indistincts. Longtemps contenue par le régime autonomiste, cette revendication pourrait ainsi relever d’un élan communautaire contestataire essentiellement passionnel qui ne traduirait pas, pour autant, l’émergence d’un système politique véritablement inédit, pensé en profondeur dans ses dimensions pragmatique et matérielle, enraciné dans une authentique refonte du modèle socio-économique antérieur. Au désir d’émancipation d’une partie de la population vis-à-vis de la puissance colonisatrice répondrait cette affirmation récente et forte d’une nécessaire métamorphose sociopolitique qui, formulée en termes péremptoires mais dans le fond toujours chancelante et érigée sur un pied d’argile, se réduirait potentiellement à un vœu pieux. On peut supposer, en le voyant affleurer de façon régulière dans les productions littéraires francophones de la Polynésie française du nouveau millénaire, que ce sentiment de revendication, fondé sur la conviction, souvent diffuse, d’une appartenance de l’individu à un ensemble à la fois défini par ses origines ethniques et ses pratiques culturelles—on ne sait pas très bien, en définitive, si c’est le sang, la coutume et/ou la simple démarche identificatoire qui fonde(nt) l’autochtonie—est présent à des degrés variables depuis plusieurs décennies dans un imaginaire social travaillé sensiblement ou silencieusement par des dissensions internes jusqu’alors réprimées. Confusion des repères territoriaux, institutionnels et culturels, éclatement de la sphère du sacré ritualisé sous la pression des modèles religieux allochtones: autant de facteurs induisant la déréliction du moi indigène, opprimé par des forces exogènes qui le submergent [End Page 1] d’autant plus qu’elles le poussent à recomposer par des biais artificiels et des gestes superficiels une identité mā’ohi de circonstance, fantasmée à partir de schèmes culturels rêvés surtout comme des moyens de résistance au paradigme colonial. Nathalie Salmon-Hudry, écrivaine et membre du parti indépendantiste récemment installé dans ses fonctions à la tête du Pays, pose ainsi la question de sa propre place dans la société tahitienne contemporaine, en sondant les tréfonds d’un moi parfois réduit à un corps-prison, dans Je suis née morte, ","PeriodicalId":19369,"journal":{"name":"Nouvelles Études Francophones","volume":"10 1","pages":"0"},"PeriodicalIF":0.0,"publicationDate":"2023-01-01","publicationTypes":"Journal Article","fieldsOfStudy":null,"isOpenAccess":false,"openAccessPdf":"","citationCount":null,"resultStr":null,"platform":"Semanticscholar","paperid":"136003158","PeriodicalName":null,"FirstCategoryId":null,"ListUrlMain":null,"RegionNum":0,"RegionCategory":"","ArticlePicture":[],"TitleCN":null,"AbstractTextCN":null,"PMCID":"","EPubDate":null,"PubModel":null,"JCR":null,"JCRName":null,"Score":null,"Total":0}
{"title":"Cacaphonies by Annabel Kim (review)","authors":"Joanne Brueton","doi":"10.1353/nef.2023.a905947","DOIUrl":"https://doi.org/10.1353/nef.2023.a905947","url":null,"abstract":"Reviewed by: Cacaphonies by Annabel Kim Joanne Brueton Kim, Annabel. Cacaphonies. Minneapolis, U of Minnesota P, 2022. ISBN 9781517910877. 296 p. Merde! En 1896, devant tout le gratin de l’avant-garde littéraire, Alfred Jarry transforme la merde en un signifiant tristement célèbre. Jarry orthographie mal le mot “merde” (“merdre”), nous invitant par là à penser l’excrémentiel comme ce qui briserait l’ordre symbolique: la matière opaque, supplémentaire et énonciative qui, selon la belle formule de Lacan, est un “mot d’avant le commencement” (Lacan 660). Le “r” supplémentaire de “merdre,” aussi bien que sa paronomasie, attire notre attention sur les restes—la merde—au cœur même de tout échange symbolique, à tel point que l’excrémentiel semble s’attaquer tant à la langue qu’au sens littéraire. Or Cacaphonies, l’étude adroite, inédite et pleine d’esprit que nous offre Annabel Kim, érige la merde en un lieu épistémologique privilégié et foisonnant de sens dans la littérature française du 20e siècle. À partir d’un corpus de huit auteurs français incontournables du canon littéraire moderne, dont Céline, Beckett, Sartre, Genet, Duras, Gary, Garréta et Pennac, l’ouvrage s’intéresse à la manière dont la merde—souvent pensée comme signifiant vide (Jarry), substitut psychanalytique (Freud) ou symbole scatologique d’abjection à expulser et à désavouer (Kristeva)—peut opérer comme un vecteur d’égalité radicale. Elle devient donc un levier démocratique qui fait s’effondrer l’élitisme de l’objet littéraire prônant l’universalisme abstrait de la nation française, dont la mission civilisatrice, les valeurs rationalistes des Lumières et l’effa-cement de la différence ne font qu’exclure et déshumaniser. En s’appuyant sur les embûches idéalistes d’un universalisme “riche de tout le particulier” chez Césaire (Lettre à Maurice Thorez 9), qui préconiserait une expérience vécue de l’individu se privant, toutefois, des corps incarnés qui sont les véritables interlocuteurs du monde, Kim nous offre une théorisation d’un universalisme fécal: l’acte de chier, plus encore que toutes nos autres fonctions corporelles, est un acte universel qui transcende toute différence [. . .] La matière fécale [. . .] nous rappelle la matérialité et le caractère concret de l’existence humaine [. . .] elle brise, mieux que toute autre chose, l’illusion que nous sommes des abstractions propres. (28–29)21 [End Page 255] Si le texte de Kim met en avant le “fondement fécal” de ces auteurs phares, son analyse se penche sur l’expérience viscérale d’une littérature française moderne qui remet en cause la représentation du “corps comme propre et respectable, notamment dans une littérature canonisée qui agit comme vecteur essentiel de la diffusion de la francité” (30),22 afin de révéler la potentielle éthique d’un corp[u]s qui, à la Genet dans son étude de Rembrandt, “digère, est chaud, lourd, qui sent, et qui chie” (“Ce qui est resté d’un Rembrandt déchiré en petits carrés bien réguliers, et foutu aux ","PeriodicalId":19369,"journal":{"name":"Nouvelles Études Francophones","volume":"45 1","pages":"0"},"PeriodicalIF":0.0,"publicationDate":"2023-01-01","publicationTypes":"Journal Article","fieldsOfStudy":null,"isOpenAccess":false,"openAccessPdf":"","citationCount":null,"resultStr":null,"platform":"Semanticscholar","paperid":"136003168","PeriodicalName":null,"FirstCategoryId":null,"ListUrlMain":null,"RegionNum":0,"RegionCategory":"","ArticlePicture":[],"TitleCN":null,"AbstractTextCN":null,"PMCID":"","EPubDate":null,"PubModel":null,"JCR":null,"JCRName":null,"Score":null,"Total":0}