{"title":"Jacques Audiard by Gemma King (review)","authors":"Erin Tremblay Ponnou-Delaffon, Erin Tremblay Ponnou-Delaffon","doi":"10.1353/nef.2023.a905940","DOIUrl":null,"url":null,"abstract":"Reviewed by: Jacques Audiard by Gemma King Erin Tremblay Ponnou-Delaffon and Erin Tremblay Ponnou-Delaffon King, Gemma. Jacques Audiard. Manchester, Manchester UP, 2021. French Film Directors Series. ISBN 9781526133007. 188 p. Première monographie consacrée au célèbre réalisateur, scénariste et producteur français, Jacques Audiard de Gemma King représente une contribution substantielle aux études cinématographiques. L’ouvrage poursuit la tendance—observée tant dans les travaux antérieurs de l’auteure que dans ce domaine de recherche en général—qui s’attache à décentrer la France et le cinéma national dans le but de privilégier une perspective transnationale. D’ailleurs, l’inclusion de ce volume dans la série “French Film Directors” s’avère intéressante car, comme l’auteure nous le démontre, l’œuvre d’Audiard englobe et dépasse, voire problématise, à la fois les trois termes, “français,” “film” et “réalisateurs.” La démarche de King s’inspire du cinéma d’Audiard, prenant les limites, les barrières et les frontières—ainsi que leur traversée, leur transgression et leur démantèlement—comme motif central et comme élément structurant du livre. Selon sa thèse, appuyée avec brio, l’art d’Audiard serait un cinéma qui “dépasse les frontières” (5),4 et ce sur plusieurs plans: thématique, esthétique, linguistique, genré, socioculturel, générique, théorique et national. Ainsi, Audiard et ses films occupentils une position double et parfois paradoxale qui renforce et repense en même temps nos catégories traditionnelles: Situés quelque part entre les films d’art et d’essai et ceux de la série B, le français et le transnational, le féministe et le patriarcal, le familier et l’innovant, les personnages et les films de Jacques Audiard sont à l’image de sa posture toujours changeante, insaisissable, à la fois au sein et au-delà de l’imaginaire du cinéma français. (160)5 L’analyse se décline en trois chapitres principaux: “Body” (corps), “Society” (Société) “Globe” (Globe). Cette progression du plus intime au plus mondial permet à King de souligner la variété ainsi que les enjeux des lignes physiques et symboliques transgressées dans et par le corpus d’Audiard. Chaque chapitre interroge deux ou trois longs métrages réalisés par le cinéaste, tout en se montrant attentif à son travail en tant que scénariste, producteur, monteur et ingénieur du son, ainsi [End Page 228] qu’à ses projets mineurs comme ses clips. (Paru en 2021, l’ouvrage ne tient pas compte de son dernier film, Les Olympiades (2021), co-écrit avec Céline Sciamma et Léa Mysius.) Dans l’introduction, l’auteure insiste sur la centralité des corps traumatisés et vulnérables chez Audiard. Elle contextualise son corpus en termes d’influences (notamment familiale), de collaborations et d’engagements (notamment sa participation au Club des 13 et au Collectif des cinéastes pour les sans-papiers). Elle y survole également les grandes lignes de sa filmographie. Cette introduction fait donc ressortir d’emblée une tension entre deux fils conducteurs du livre. D’une part, l’auteure met l’accent sur la cohérence de cette œuvre largement récompensée au niveau national et les éléments qui font la signature auteuriste d’Audiard. D’autre part, à l’instar de cette filmographie, King complique la notion même d’auteur, car le travail d’Audiard s’ouvre vers un cinéma-monde, pour reprendre le terme théorisé par Bill Marshall. Le premier chapitre, “Body: Physical boundaries,” examine en particulier De battre mon cœur s’est arrêté (2005), Sur mes lèvres (2001) et De rouille et d’os (2012), trois films qui, à la manière propre d’Audiard, jouent avec les codes génériques et les déjouent, notamment ceux des Bildungsroman, film noir, polar, thriller et (mélo)drame familial ou romantique. King postule que les trois films se focalisent esthétiquement et narrativement sur le corps d’une figure récurrente chez Audiard: l’outsider. Prenant pour point...","PeriodicalId":19369,"journal":{"name":"Nouvelles Études Francophones","volume":"15 1","pages":"0"},"PeriodicalIF":0.0000,"publicationDate":"2023-01-01","publicationTypes":"Journal Article","fieldsOfStudy":null,"isOpenAccess":false,"openAccessPdf":"","citationCount":"0","resultStr":null,"platform":"Semanticscholar","paperid":null,"PeriodicalName":"Nouvelles Études Francophones","FirstCategoryId":"1085","ListUrlMain":"https://doi.org/10.1353/nef.2023.a905940","RegionNum":0,"RegionCategory":null,"ArticlePicture":[],"TitleCN":null,"AbstractTextCN":null,"PMCID":null,"EPubDate":"","PubModel":"","JCR":"","JCRName":"","Score":null,"Total":0}
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Abstract
Reviewed by: Jacques Audiard by Gemma King Erin Tremblay Ponnou-Delaffon and Erin Tremblay Ponnou-Delaffon King, Gemma. Jacques Audiard. Manchester, Manchester UP, 2021. French Film Directors Series. ISBN 9781526133007. 188 p. Première monographie consacrée au célèbre réalisateur, scénariste et producteur français, Jacques Audiard de Gemma King représente une contribution substantielle aux études cinématographiques. L’ouvrage poursuit la tendance—observée tant dans les travaux antérieurs de l’auteure que dans ce domaine de recherche en général—qui s’attache à décentrer la France et le cinéma national dans le but de privilégier une perspective transnationale. D’ailleurs, l’inclusion de ce volume dans la série “French Film Directors” s’avère intéressante car, comme l’auteure nous le démontre, l’œuvre d’Audiard englobe et dépasse, voire problématise, à la fois les trois termes, “français,” “film” et “réalisateurs.” La démarche de King s’inspire du cinéma d’Audiard, prenant les limites, les barrières et les frontières—ainsi que leur traversée, leur transgression et leur démantèlement—comme motif central et comme élément structurant du livre. Selon sa thèse, appuyée avec brio, l’art d’Audiard serait un cinéma qui “dépasse les frontières” (5),4 et ce sur plusieurs plans: thématique, esthétique, linguistique, genré, socioculturel, générique, théorique et national. Ainsi, Audiard et ses films occupentils une position double et parfois paradoxale qui renforce et repense en même temps nos catégories traditionnelles: Situés quelque part entre les films d’art et d’essai et ceux de la série B, le français et le transnational, le féministe et le patriarcal, le familier et l’innovant, les personnages et les films de Jacques Audiard sont à l’image de sa posture toujours changeante, insaisissable, à la fois au sein et au-delà de l’imaginaire du cinéma français. (160)5 L’analyse se décline en trois chapitres principaux: “Body” (corps), “Society” (Société) “Globe” (Globe). Cette progression du plus intime au plus mondial permet à King de souligner la variété ainsi que les enjeux des lignes physiques et symboliques transgressées dans et par le corpus d’Audiard. Chaque chapitre interroge deux ou trois longs métrages réalisés par le cinéaste, tout en se montrant attentif à son travail en tant que scénariste, producteur, monteur et ingénieur du son, ainsi [End Page 228] qu’à ses projets mineurs comme ses clips. (Paru en 2021, l’ouvrage ne tient pas compte de son dernier film, Les Olympiades (2021), co-écrit avec Céline Sciamma et Léa Mysius.) Dans l’introduction, l’auteure insiste sur la centralité des corps traumatisés et vulnérables chez Audiard. Elle contextualise son corpus en termes d’influences (notamment familiale), de collaborations et d’engagements (notamment sa participation au Club des 13 et au Collectif des cinéastes pour les sans-papiers). Elle y survole également les grandes lignes de sa filmographie. Cette introduction fait donc ressortir d’emblée une tension entre deux fils conducteurs du livre. D’une part, l’auteure met l’accent sur la cohérence de cette œuvre largement récompensée au niveau national et les éléments qui font la signature auteuriste d’Audiard. D’autre part, à l’instar de cette filmographie, King complique la notion même d’auteur, car le travail d’Audiard s’ouvre vers un cinéma-monde, pour reprendre le terme théorisé par Bill Marshall. Le premier chapitre, “Body: Physical boundaries,” examine en particulier De battre mon cœur s’est arrêté (2005), Sur mes lèvres (2001) et De rouille et d’os (2012), trois films qui, à la manière propre d’Audiard, jouent avec les codes génériques et les déjouent, notamment ceux des Bildungsroman, film noir, polar, thriller et (mélo)drame familial ou romantique. King postule que les trois films se focalisent esthétiquement et narrativement sur le corps d’une figure récurrente chez Audiard: l’outsider. Prenant pour point...