« Par le verbe autant que par le feu » : L’émeute comme moment de vérité dans les livres du Comité invisible

Abstract:Prophétisée, glosée, narrée à la manière d’une épopée collective, l’émeute occupe une place centrale dans les essais du Comité invisible. Porteur d’une mémoire de la révolution, le motif insurrectionnel est revitalisé par le collectif post-situationniste, qui célèbre, partout où elles ont lieu dans le monde, les manifestations de refus d’une société gouvernée par des logiques marchandes et spectaculaires. Alternant les postures d’herméneute ou d’incitateur, le Comité invisible considère l’émeute comme un élément fondateur de la grammaire politique de l’époque en tant qu’elle est un “moment de vérité” où se réalise l’idéal de destitution de toute autorité. Cependant, cette destitution ne va pas sans ambiguïté dans la mesure où elle semble ne pouvoir s’énoncer que dans les termes d’une communauté d’élus. Entre dissolution dans la foule anonyme et partage d’une vision entre “amis” clairvoyants, l’émeute est l’objet de redéfinitions mouvantes d’un livre à l’autre, ce qui témoigne des tensions qui animent, d’un volume à l’autre, le collectif anonyme mais aussi de ses stratégies de diffusion d’un imaginaire viral de l’émeute.