Rectorragies révélatrices d’une allergie alimentaire après une transplantation hépatique : à propos d’un cas

Les allergies alimentaires et hypersensibilités médicamenteuses sont des complications de plus en plus reconnues après transplantation hépatique pédiatrique, avec une prévalence pouvant atteindre 54,3 %. Les allergies alimentaires IgE-médiées se manifestent fréquemment par des signes cutanés et des symptômes gastro-intestinaux tels que douleurs abdominales et diarrhées, tandis que les rectorragies comme présentation initiale restent rares. Nous rapportons le cas original d’une fillette de 12 mois ayant bénéficié d’une transplantation hépatique à l’âge de 9 mois. Elle présentait une atrésie des voies biliaires, initialement traitée par dérivation bilio-digestive sans succès, ayant évolué vers une cirrhose hépatique compliquée d’insuffisance hépatocellulaire, motivant la greffe hépatique et la mise en place d’une immunosuppression par tacrolimus. Elle a présenté deux épisodes de rectorragies de grande abondance. Une évaluation allergologique a confirmé une allergie IgE-médiée à l’œuf et une proctocolite hémorragique associée à une hypersensibilité aux protéines du lait de vache. De plus, une hypersensibilité à l’aspirine a été confirmée par un test de provocation orale. La prise en charge a inclus un régime d’éviction de l’œuf de poule et du lait de vache ainsi qu’un protocole de désensibilisation à l’aspirine, entraînant une amélioration clinique juste après éviction des allergènes. La survenue de ces rectorragies pourrait s’expliquer par des perturbations immunitaires induites par la transplantation hépatique, notamment sous tacrolimus. Cet immunosuppresseur favorise une réponse Th2 avec production accrue d’IgE. Associé aux antibiotiques, il altère le microbiote intestinal et augmente la perméabilité digestive, facilitant la sensibilisation aux allergènes. Ce cas souligne l’importance d’un dépistage allergologique pré-greffe et d’un suivi étroit après transplantation. Une vigilance particulière doit être accordée aux manifestations cliniques atypiques, telles que les rectorragies, afin de ne pas méconnaître une cause allergique et d’optimiser la prise en charge.