Suivi prospectif de 37 grossesses chez des femmes traitées par anti-IL-1 pour des maladies auto-inflammatoires systémiques : étude multicentrique française de la cohorte GR2

Introduction

Les inhibiteurs de l’interleukine-1 (IL1) sont des traitements efficaces dans certaines maladies auto-inflammatoires telles que la maladie de Still de l’adulte (AOSD) et la fièvre méditerranéenne familiale (FMF). Ces maladies touchent les femmes en âge de procréer ce qui soulève des inquiétudes quant à la sécurité des anti-IL1 pendant la grossesse, mais les données restent encore limitées à ce sujet [1]. L’objectif était de décrire les grossesses, les éventuelles complications et l’état santé des nourrissons de femmes exposées aux anti-IL1.

Patients et méthodes

Nous avons analysé les données des patientes enceintes suivies pour une maladie autoinflammatoire issues de l’étude prospective du « Groupe de recherche sur la Grossesse et les Maladies Rares » (GR2), ayant reçu des anti-IL1 entre la conception et le terme de leur grossesse.

Résultats

Nous avons inclus 37 grossesses (dont 3 grossesses gémellaires) chez 31 patientes exposées aux anti-IL1 (anakinra dans 33 cas et canakinumab dans 4 cas). Les maladies autoinflammatoires maternelles sous-jacentes étaient respectivement uen maladie de Still (n = 17), une fièvre méditerranéenne familiale (n = 16), une maladie autoinflammatoire inclassée (n = 2), une cryopyrinopathie (n = 1), un TRAPS (syndrome périodique associé au récepteur du TNF) (n = 1) et la péricardite récurrente (n = 1). Les femmes enceintes étaient exposées aux anti-IL-1 pendant une durée médiane de 26 semaines [6 ; 37,4], la majorité des patientes ayant été traitées pendant la période périconceptionnelle et jusqu’au troisième trimestre pour l’anakinra. Quinze patientes (41 %) ont eu au moins une complication pendant la grossesse : huit d’entre elles (22 %) ont présenté une infection (appendicite, infection au COVID-19, bronchite, otite externe, sialadénite et pyélonéphrite) ; cinq (14 %) un diabète gestationnel ; cinq (14 %) une cholestase hépatique ; trois (8 %) une menace d’accouchement prématuré mais la grossesse a finalement été menée à terme ; deux (5 %) un retard de croissance intra-utérin et une une pré-éclampsie (3 %). Une patiente souffrant de FMF non contrôlée a eu deux fausses couches spontanées précoces (5 %), survenues lors de crises. Quatorze pour cent des accouchements étaient prématurés, tous survenus entre la 32^e et la 37^e semaine d’aménorrhée. Malgré le traitement, des poussées de la maladie sont survenues dans 72 % des grossesses. Les nouveau-nés pesaient 3220 grammes [2873 ; 3398]. Aucune malformation non mineure n’a été observée. Les 32 nouveau-nés suivis jusqu’à l’âge de six mois étaient en bonne santé. Trois d’entre eux ont présenté des infections, un a développé une laryngomalacie et un autre avait une hernie inguinale. Parmi les 22 nouveau-nés suivis depuis plus de six mois (médiane : 15 mois après la naissance [12 ; 27]), tous les enfants ont été déclarés en bonne santé avec un développement psychomoteur normal. Vingt mères (53 %) ont allaité leur enfant de manière mixte ou exclusive.

Conclusion

Les anti-IL-1 pendant la grossesse chez les femmes souffrant de maladies autoinflammatoires et en particulier l’anakinra pour lequel nous avons eu la grande majorité des grossesses exposées semblent présenter de faibles risques maternels et néonataux. Le contrôle de la maladie sous-jacente est un facteur clé dans la prévention des complications. Ces résultats fournissent des preuves rassurantes pour l’utilisation de l’anakinra et du canakinumab pendant la grossesse.