C. Chevallier , F. Genestier , N. Paret , A.M. Patat , French PCC Research group , J. Langrand
{"title":"每盎司大麻二酚的消费量:法国毒物控制中心接到电话的背后原因是什么?","authors":"C. Chevallier , F. Genestier , N. Paret , A.M. Patat , French PCC Research group , J. Langrand","doi":"10.1016/j.toxac.2024.08.032","DOIUrl":null,"url":null,"abstract":"<div><h3>Objectif</h3><p>Le cannabidiol (CBD) est un cannabinoïde psychoactif qui n’induit pas les effets psychodysleptiques du delta-9-tétrahydrocannabinol (THC) <span><span>[1]</span></span>. Il présente un intérêt thérapeutique, notamment dans l’épilepsie ou les douleurs chroniques ; des formes médicamenteuses sont disponibles en France <span><span>[2]</span></span>. Jusqu’en 2020, le CBD était cependant considéré comme une substance stupéfiante. À la suite de la procédure pénale engagée dans l’affaire « Kanavape », la Cour de Justice de l’Union européenne a levé l’interdiction de vente de produits à base de CBD. L’arrêté publié en 2021 a laissé place au marché du « <em>cannabis light</em> ». Le CBD est depuis présenté au grand public comme un produit de faible dangerosité, avec des vertus thérapeutiques alléguées diverses, malgré les risques d’effets secondaires et d’interactions médicamenteuses <span><span>[2]</span></span>. L’objectif de ce travail est de décrire les usages et les complications observées avec la prise de CBD per os au travers des appels aux CAP-TV.</p></div><div><h3>Méthodes</h3><p>Étude rétrospective des cas de consommation de CBD per os à partir du système d’information des CAP-TV français (SICAP) entre 2017–2023. Les agents étudiés correspondaient aux produits CBD médicamenteux ou accessibles en vente libre (CBD_VL). Ont été exclus les cas de co-intoxication volontaire avec une autre substance (autre cannabinoïde, drogue ou médicament) et les tentatives de suicide.</p></div><div><h3>Résultats</h3><p>La requête a identifié 699 dossiers dont 343 ont été inclus dans l’analyse. Dans 79 % des cas, le produit consommé est du CBD_VL. L’âge médian des patients est de 27<!--> <!-->ans (3<!--> <!-->jours à 95<!--> <!-->ans), avec un sex-ratio de 1 ; 19 % des patients ont un âge<!--> <!-->≤<!--> <!-->3<!--> <!-->ans. On enregistre 6 fois plus d’appels entre 2021–2023 (<em>n</em> <!-->=<!--> <!-->293), à la suite du changement de réglementation, versus 2017–2020 (<em>n</em> <!-->=<!--> <!-->50), sans augmentation significative de la gravité des cas. L’indication de prise était rapportée dans 58 % des dossiers : épilepsie (33 % ; CBD médicamenteux exclusif), douleur (24 %), anxiolyse (15 %), usage récréatif (14 %), trouble du sommeil (10 %), etc. Le produit CBD était très majoritairement sous forme d’huile (70 %), de confiseries (9 %) ou de e-liquide (6 %). Les circonstances les plus rapportées sont une erreur thérapeutique (22 %), une ingestion accidentelle par défaut de perception du risque (21 % ; âge moyen 2,9 ans ; CBD_VL dans 94 % des cas) ou un mésusage/surdosage involontaire (21 %). Dans 84 % des cas, la gravité selon le Poison Severity Score était nulle ou faible, avec 3 % seulement de gravité forte (11), dont 1 décès où l’imputabilité du CBD est peu probable. Les effets rapportés sont des troubles neurologiques (somnolence, ataxie, asthénie, trouble de conscience), cardiovasculaires (tachycardie) et digestifs (nausées, vomissements). Des adultérations par d’autres cannabinoides sont observées. Parmi les dossiers exclus, on note 38 cas de consommation de CBD à visée suicidaire – seul (<em>n</em> <!-->=<!--> <!-->6) ou en association à d’autres substances (<em>n</em> <!-->=<!--> <!-->32), dont 11 cas chez des mineurs.</p></div><div><h3>Discussion et conclusion</h3><p>Ces résultats confirment une augmentation des appels concernant la prise de CBD ces dernières années, essentiellement pour le CBD_VL. Le CBD est cependant une substance psychoactive qui n’est pas inerte pharmacologiquement. Sa consommation peut induire des troubles de la vigilance et des interactions entre le CBD et un certain nombre de médicaments ont été mises en évidence. La prise de CBD de manière concomitante avec des médicaments nécessite un avis médical en raison du risque de perte d’efficacité des traitements médicamenteux des patients ou de la majoration des effets indésirables. Le CBD non pharmaceutique ne fait l’objet d’aucun contrôle de mise sur le marché. Ces produits peuvent contenir des taux de THC supérieur au taux maximal attendu, voire des néo-cannabinoides encore plus puissants (HHC, THCP, etc.) <span><span>[3]</span></span>. Il apparaît primordial de renforcer la sécurité de ces produits par une réglementation adaptée et de poursuivre les campagnes d’information et de prévention sur l’usage des cannabinoides.</p></div>","PeriodicalId":23170,"journal":{"name":"Toxicologie Analytique et Clinique","volume":"36 3","pages":"Page S88"},"PeriodicalIF":1.8000,"publicationDate":"2024-09-10","publicationTypes":"Journal Article","fieldsOfStudy":null,"isOpenAccess":false,"openAccessPdf":"","citationCount":"0","resultStr":"{\"title\":\"La consommation de cannabidiol per os : que se cache-t-il derrière les appels aux Centres Antipoison français ?\",\"authors\":\"C. Chevallier , F. Genestier , N. Paret , A.M. Patat , French PCC Research group , J. 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Le CBD est depuis présenté au grand public comme un produit de faible dangerosité, avec des vertus thérapeutiques alléguées diverses, malgré les risques d’effets secondaires et d’interactions médicamenteuses <span><span>[2]</span></span>. L’objectif de ce travail est de décrire les usages et les complications observées avec la prise de CBD per os au travers des appels aux CAP-TV.</p></div><div><h3>Méthodes</h3><p>Étude rétrospective des cas de consommation de CBD per os à partir du système d’information des CAP-TV français (SICAP) entre 2017–2023. Les agents étudiés correspondaient aux produits CBD médicamenteux ou accessibles en vente libre (CBD_VL). Ont été exclus les cas de co-intoxication volontaire avec une autre substance (autre cannabinoïde, drogue ou médicament) et les tentatives de suicide.</p></div><div><h3>Résultats</h3><p>La requête a identifié 699 dossiers dont 343 ont été inclus dans l’analyse. Dans 79 % des cas, le produit consommé est du CBD_VL. L’âge médian des patients est de 27<!--> <!-->ans (3<!--> <!-->jours à 95<!--> <!-->ans), avec un sex-ratio de 1 ; 19 % des patients ont un âge<!--> <!-->≤<!--> <!-->3<!--> <!-->ans. On enregistre 6 fois plus d’appels entre 2021–2023 (<em>n</em> <!-->=<!--> <!-->293), à la suite du changement de réglementation, versus 2017–2020 (<em>n</em> <!-->=<!--> <!-->50), sans augmentation significative de la gravité des cas. L’indication de prise était rapportée dans 58 % des dossiers : épilepsie (33 % ; CBD médicamenteux exclusif), douleur (24 %), anxiolyse (15 %), usage récréatif (14 %), trouble du sommeil (10 %), etc. Le produit CBD était très majoritairement sous forme d’huile (70 %), de confiseries (9 %) ou de e-liquide (6 %). Les circonstances les plus rapportées sont une erreur thérapeutique (22 %), une ingestion accidentelle par défaut de perception du risque (21 % ; âge moyen 2,9 ans ; CBD_VL dans 94 % des cas) ou un mésusage/surdosage involontaire (21 %). Dans 84 % des cas, la gravité selon le Poison Severity Score était nulle ou faible, avec 3 % seulement de gravité forte (11), dont 1 décès où l’imputabilité du CBD est peu probable. Les effets rapportés sont des troubles neurologiques (somnolence, ataxie, asthénie, trouble de conscience), cardiovasculaires (tachycardie) et digestifs (nausées, vomissements). Des adultérations par d’autres cannabinoides sont observées. Parmi les dossiers exclus, on note 38 cas de consommation de CBD à visée suicidaire – seul (<em>n</em> <!-->=<!--> <!-->6) ou en association à d’autres substances (<em>n</em> <!-->=<!--> <!-->32), dont 11 cas chez des mineurs.</p></div><div><h3>Discussion et conclusion</h3><p>Ces résultats confirment une augmentation des appels concernant la prise de CBD ces dernières années, essentiellement pour le CBD_VL. Le CBD est cependant une substance psychoactive qui n’est pas inerte pharmacologiquement. Sa consommation peut induire des troubles de la vigilance et des interactions entre le CBD et un certain nombre de médicaments ont été mises en évidence. La prise de CBD de manière concomitante avec des médicaments nécessite un avis médical en raison du risque de perte d’efficacité des traitements médicamenteux des patients ou de la majoration des effets indésirables. Le CBD non pharmaceutique ne fait l’objet d’aucun contrôle de mise sur le marché. Ces produits peuvent contenir des taux de THC supérieur au taux maximal attendu, voire des néo-cannabinoides encore plus puissants (HHC, THCP, etc.) <span><span>[3]</span></span>. 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La consommation de cannabidiol per os : que se cache-t-il derrière les appels aux Centres Antipoison français ?
Objectif
Le cannabidiol (CBD) est un cannabinoïde psychoactif qui n’induit pas les effets psychodysleptiques du delta-9-tétrahydrocannabinol (THC) [1]. Il présente un intérêt thérapeutique, notamment dans l’épilepsie ou les douleurs chroniques ; des formes médicamenteuses sont disponibles en France [2]. Jusqu’en 2020, le CBD était cependant considéré comme une substance stupéfiante. À la suite de la procédure pénale engagée dans l’affaire « Kanavape », la Cour de Justice de l’Union européenne a levé l’interdiction de vente de produits à base de CBD. L’arrêté publié en 2021 a laissé place au marché du « cannabis light ». Le CBD est depuis présenté au grand public comme un produit de faible dangerosité, avec des vertus thérapeutiques alléguées diverses, malgré les risques d’effets secondaires et d’interactions médicamenteuses [2]. L’objectif de ce travail est de décrire les usages et les complications observées avec la prise de CBD per os au travers des appels aux CAP-TV.
Méthodes
Étude rétrospective des cas de consommation de CBD per os à partir du système d’information des CAP-TV français (SICAP) entre 2017–2023. Les agents étudiés correspondaient aux produits CBD médicamenteux ou accessibles en vente libre (CBD_VL). Ont été exclus les cas de co-intoxication volontaire avec une autre substance (autre cannabinoïde, drogue ou médicament) et les tentatives de suicide.
Résultats
La requête a identifié 699 dossiers dont 343 ont été inclus dans l’analyse. Dans 79 % des cas, le produit consommé est du CBD_VL. L’âge médian des patients est de 27 ans (3 jours à 95 ans), avec un sex-ratio de 1 ; 19 % des patients ont un âge ≤ 3 ans. On enregistre 6 fois plus d’appels entre 2021–2023 (n = 293), à la suite du changement de réglementation, versus 2017–2020 (n = 50), sans augmentation significative de la gravité des cas. L’indication de prise était rapportée dans 58 % des dossiers : épilepsie (33 % ; CBD médicamenteux exclusif), douleur (24 %), anxiolyse (15 %), usage récréatif (14 %), trouble du sommeil (10 %), etc. Le produit CBD était très majoritairement sous forme d’huile (70 %), de confiseries (9 %) ou de e-liquide (6 %). Les circonstances les plus rapportées sont une erreur thérapeutique (22 %), une ingestion accidentelle par défaut de perception du risque (21 % ; âge moyen 2,9 ans ; CBD_VL dans 94 % des cas) ou un mésusage/surdosage involontaire (21 %). Dans 84 % des cas, la gravité selon le Poison Severity Score était nulle ou faible, avec 3 % seulement de gravité forte (11), dont 1 décès où l’imputabilité du CBD est peu probable. Les effets rapportés sont des troubles neurologiques (somnolence, ataxie, asthénie, trouble de conscience), cardiovasculaires (tachycardie) et digestifs (nausées, vomissements). Des adultérations par d’autres cannabinoides sont observées. Parmi les dossiers exclus, on note 38 cas de consommation de CBD à visée suicidaire – seul (n = 6) ou en association à d’autres substances (n = 32), dont 11 cas chez des mineurs.
Discussion et conclusion
Ces résultats confirment une augmentation des appels concernant la prise de CBD ces dernières années, essentiellement pour le CBD_VL. Le CBD est cependant une substance psychoactive qui n’est pas inerte pharmacologiquement. Sa consommation peut induire des troubles de la vigilance et des interactions entre le CBD et un certain nombre de médicaments ont été mises en évidence. La prise de CBD de manière concomitante avec des médicaments nécessite un avis médical en raison du risque de perte d’efficacité des traitements médicamenteux des patients ou de la majoration des effets indésirables. Le CBD non pharmaceutique ne fait l’objet d’aucun contrôle de mise sur le marché. Ces produits peuvent contenir des taux de THC supérieur au taux maximal attendu, voire des néo-cannabinoides encore plus puissants (HHC, THCP, etc.) [3]. Il apparaît primordial de renforcer la sécurité de ces produits par une réglementation adaptée et de poursuivre les campagnes d’information et de prévention sur l’usage des cannabinoides.