Le « Geste » de la dissidence, d’une question esthétique à des enjeux politiques (Collectif Inculte, Céline Minard, Lucie Taïeb)

Abstract

Abstract:Dans son ouvrage Désirer désobéir (2019), Georges Didi-Huberman fait des soulèvements contre le pouvoir un geste, un mouvement corporel qui est manière de se dresser contre ce qui opprime. L’approche phénoménologique de ce critique a été jugée dépolitisante par certains, parmi lesquels l’historien Philippe Artières. C’est dans le contexte de ces interrogations théoriques que je propose d’analyser la manière dont la littérature contemporaine représente la révolte populaire, réelle ou fictionnelle, et la façon dont il est possible de commenter ces figurations sans séparer ni superposer les enjeux esthétiques et politiques attachés à celles-ci. La lecture de Bastard battle de Céline Minard (2008), du Livre des places du collectif Inculte (2018) et des Échappées de Lucie Taïeb (2019) met en lumière trois projets différents autour de la révolte, mais qui ont en partage de porter une attention particulière au corps des révoltés–et la mise en scène d’une révolte par le prisme du corps des révoltés ne signifie pas nécessairement que cette attention littéraire au geste du soulèvement serait purement esthétisante. Pour l’écrivain qui s’intéresse aux formes de l’émeute, saisir chaque geste émancipateur dans sa spécificité apparaîtrait alors comme une manière de dire ce à quoi s’opposent les révoltés, et ce qu’ils désirent, mettant ainsi en scène des modalités d’action spécifiques, ou une réflexion politique propre à une émeute donnée.