{"title":"Analyse descriptive des tentatives de suicide au centre hospitalier de Cayenne de 2018 à 2019","authors":"Swann GEOFFROY , Rémi MUTRICY","doi":"10.1016/j.mmifmc.2025.07.027","DOIUrl":null,"url":null,"abstract":"<div><h3>Introduction</h3><div>Les patients se présentant aux urgences pour tentatives de suicide (TS) sont habituels. L’impact psychologique et social, l’invalidité à long terme qui peut résulter des blessures, ainsi que le risque majeur de récidive et de décès par suicide, font des TS un important défi en santé publique. En Guyane française, région d’outre-mer d’Amérique Latine située entre le Surinam et le Brésil, la jeunesse, la migration récente, la précarité et le retard structurel en offre de soins sont des caractéristiques sociales impactant l’état de santé de la population. Nous avons émis l’hypothèse que ce contexte particulier influencerait les processus suicidaires et leur prise en charge médicale. L’objectif principal est l'identification des caractéristiques épidémiologiques des personnes accueillies aux urgences de Cayenne pour tentative de suicide afin de proposer des interventions en santé pertinentes.</div></div><div><h3>Méthodes</h3><div>Notre étude observationnelle et rétrospective incluait 288 patients se présentant pour tentative de suicide aux urgences du centre hospitalier de Cayenne, sans limite d’âge, sur la période du 1<sup>er</sup> janvier 2018 au 31 août 2019. Selon le modèle écologique proposé par l’OMS, nous avons discuté les données premièrement d’un point de vue sociétal, puis communautaire et enfin individuel.</div></div><div><h3>Résultats</h3><div>Plus d’un tiers des patients étaient nés à l’étranger, de provenances variées : Haïti, Brésil, Surinam, Guyana, République dominicaine, Sainte Lucie, Syrie. Le sexe ratio était de 0,43 soit plus de 2 femmes pour un homme. Dix-sept pour cent des patients étaient sous l’emprise d’un ou plusieurs produits psychoactifs lors de leur passage à l’acte suicidaire. L’intoxication médicamenteuse volontaire aux psychotropes ou aux analgésiques fut la méthode la plus utilisée. Trente-neuf pour cent des patients furent hospitalisés et 10 % récidivèrent dans l’année.</div></div><div><h3>Discussions et conclusions</h3><div>Aux urgences de Cayenne, comme dans l’hexagone, les jeunes femmes, les migrants et les consommateurs de substances psychoactives font partie des populations les plus vulnérables. Une approche écologique, adaptée à la complexité des comportements suicidaires et aux particularités de la population, permet de définir des stratégies de prévention s’organisant à trois niveaux. Sur le plan sociétal, l’instruction en santé est l’un des meilleurs moyens d’améliorer l’accès aux services de santé mentale, de diminuer la stigmatisation liée aux troubles mentaux et également de réduire les risques liés à l’usage d’alcool et de drogue. Les professionnels de santé peuvent également inciter les patients et leur entourage à éviter un mésusage des médicaments. De plus, la couverture médiatique du suicide ainsi que les stratégies virtuelles de prévention sur les médias sociaux peuvent également contribuer à réduire le nombre de passages à l’acte. Sur le plan communautaire, le taux élevé des TS chez les jeunes et particulièrement les jeunes femmes nécessiterait un dépistage et des actions de prévention accrus durant la scolarité. Pour les migrants, la consultation médicale d’accueil des demandeurs d’asile, pourrait permettre de dépister les troubles psychiatriques et amorcer une prise en soin précoce. Sur le plan individuel, la majorité des facteurs déclenchants retrouvés proviennent d’une problématique affective au sein de la sphère familiale ou conjugale. Par ailleurs, en regard de la forte comorbidité de l’usage de produits psychoactifs, en particulier l’alcool, une évaluation systématique du risque suicidaire devrait être proposée aux patients consommateurs. En outre, le dispositif VigilanS permet de lutter efficacement contre les récidives.</div><div>Les auteurs n’ont pas précisé leurs éventuels liens d’intérêts.</div></div>","PeriodicalId":100906,"journal":{"name":"Médecine et Maladies Infectieuses Formation","volume":"4 3","pages":"Pages S13-S14"},"PeriodicalIF":0.0000,"publicationDate":"2025-08-01","publicationTypes":"Journal Article","fieldsOfStudy":null,"isOpenAccess":false,"openAccessPdf":"","citationCount":"0","resultStr":null,"platform":"Semanticscholar","paperid":null,"PeriodicalName":"Médecine et Maladies Infectieuses Formation","FirstCategoryId":"1085","ListUrlMain":"https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S2772743225005549","RegionNum":0,"RegionCategory":null,"ArticlePicture":[],"TitleCN":null,"AbstractTextCN":null,"PMCID":null,"EPubDate":"","PubModel":"","JCR":"","JCRName":"","Score":null,"Total":0}
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Abstract
Introduction
Les patients se présentant aux urgences pour tentatives de suicide (TS) sont habituels. L’impact psychologique et social, l’invalidité à long terme qui peut résulter des blessures, ainsi que le risque majeur de récidive et de décès par suicide, font des TS un important défi en santé publique. En Guyane française, région d’outre-mer d’Amérique Latine située entre le Surinam et le Brésil, la jeunesse, la migration récente, la précarité et le retard structurel en offre de soins sont des caractéristiques sociales impactant l’état de santé de la population. Nous avons émis l’hypothèse que ce contexte particulier influencerait les processus suicidaires et leur prise en charge médicale. L’objectif principal est l'identification des caractéristiques épidémiologiques des personnes accueillies aux urgences de Cayenne pour tentative de suicide afin de proposer des interventions en santé pertinentes.
Méthodes
Notre étude observationnelle et rétrospective incluait 288 patients se présentant pour tentative de suicide aux urgences du centre hospitalier de Cayenne, sans limite d’âge, sur la période du 1er janvier 2018 au 31 août 2019. Selon le modèle écologique proposé par l’OMS, nous avons discuté les données premièrement d’un point de vue sociétal, puis communautaire et enfin individuel.
Résultats
Plus d’un tiers des patients étaient nés à l’étranger, de provenances variées : Haïti, Brésil, Surinam, Guyana, République dominicaine, Sainte Lucie, Syrie. Le sexe ratio était de 0,43 soit plus de 2 femmes pour un homme. Dix-sept pour cent des patients étaient sous l’emprise d’un ou plusieurs produits psychoactifs lors de leur passage à l’acte suicidaire. L’intoxication médicamenteuse volontaire aux psychotropes ou aux analgésiques fut la méthode la plus utilisée. Trente-neuf pour cent des patients furent hospitalisés et 10 % récidivèrent dans l’année.
Discussions et conclusions
Aux urgences de Cayenne, comme dans l’hexagone, les jeunes femmes, les migrants et les consommateurs de substances psychoactives font partie des populations les plus vulnérables. Une approche écologique, adaptée à la complexité des comportements suicidaires et aux particularités de la population, permet de définir des stratégies de prévention s’organisant à trois niveaux. Sur le plan sociétal, l’instruction en santé est l’un des meilleurs moyens d’améliorer l’accès aux services de santé mentale, de diminuer la stigmatisation liée aux troubles mentaux et également de réduire les risques liés à l’usage d’alcool et de drogue. Les professionnels de santé peuvent également inciter les patients et leur entourage à éviter un mésusage des médicaments. De plus, la couverture médiatique du suicide ainsi que les stratégies virtuelles de prévention sur les médias sociaux peuvent également contribuer à réduire le nombre de passages à l’acte. Sur le plan communautaire, le taux élevé des TS chez les jeunes et particulièrement les jeunes femmes nécessiterait un dépistage et des actions de prévention accrus durant la scolarité. Pour les migrants, la consultation médicale d’accueil des demandeurs d’asile, pourrait permettre de dépister les troubles psychiatriques et amorcer une prise en soin précoce. Sur le plan individuel, la majorité des facteurs déclenchants retrouvés proviennent d’une problématique affective au sein de la sphère familiale ou conjugale. Par ailleurs, en regard de la forte comorbidité de l’usage de produits psychoactifs, en particulier l’alcool, une évaluation systématique du risque suicidaire devrait être proposée aux patients consommateurs. En outre, le dispositif VigilanS permet de lutter efficacement contre les récidives.
Les auteurs n’ont pas précisé leurs éventuels liens d’intérêts.