O. Durlach , M. Lamkhioued , N. Paret , A.M. Patat
{"title":"Polyglobulie secondaire : penser à la consommation chronique de chicha","authors":"O. Durlach , M. Lamkhioued , N. Paret , A.M. Patat","doi":"10.1016/j.toxac.2024.08.050","DOIUrl":null,"url":null,"abstract":"<div><h3>Objectif</h3><p>Présenter et discuter une exposition chronique à la fumée de tabac à chicha.</p></div><div><h3>Historique du cas</h3><p>Patient 49<!--> <!-->ans suivi en hématologie depuis 2019 pour une polyglobulie secondaire (hématocrite à 63 % et hémoglobine (Hb) à 22<!--> <!-->g/dL). Le bilan étiologique de polyglobulie réalisé en 2019 retrouve une hypoxémie avec PaO2 à 74<!--> <!-->mmHg, le reste du bilan est normal (bilan hépatique, vitamine B9, B12, sérologies hépatites et VIH, ferritine, TSH, érythropoïétine, absence de mutation JAK2V617F, recherche des gènes de l’hypoxie négative). L’échographie abdominale ne retrouve pas de splénomégalie et la biopsie médullaire retrouve une richesse augmentée pour l’âge, une discrète hyperplasie érythroblastique, l’immunomarquage est négatif. Le patient ne présente pas d’apnée du sommeil. Son traitement comprend de l’Aspégic 100<!--> <!-->mg/j, la pratique régulière de saignées. À l’interrogatoire, une consommation tabagique régulière de chicha (narghilé) est notée depuis plus de 20<!--> <!-->ans parfois jusqu’à 5 séances par jour. Il n’y a pas d’autre toxique consommé. En 2022, une amélioration de son état clinique et des paramètres biologiques est constatée avec une hémoglobine à 174<!--> <!-->g/L et hématocrite à 53 % lors de la nette diminution de la consommation de chicha, permettant l’espacement des saignées : de tous les 2 mois à plus de 6 mois. Le 26 février 2024, la polyglobulie est à nouveau élevée avec une hémoglobine à 19<!--> <!-->g/dL et un hématocrite à 56,2 %. Une gazométrie retrouve une carboxyhémoglobine (HbCO) à 14,7 %. Ce résultat motive le recours à un avis en pneumologie. Le 5 mars 2024, le contrôle de l’HbCO est de 18,9 %. Le patient rapporte un sevrage de toute forme de tabagisme mais fréquente toujours les bars à chichas à raison de plusieurs heures par semaine. Après avoir demandé au patient de ne plus fréquenter les bars à chichas, un contrôle biologique le 27/03/2024 retrouve une HbCO à 6 % (Normale<!--> <!--><<!--> <!-->2 %) témoignant d’une poursuite de l’exposition. Par ailleurs, la cotinine urinaire est à 660<!--> <!-->μg/L (N<!--> <!--><<!--> <!-->100<!--> <!-->μg/L lors du tabagisme passif). Ces résultats sont en faveur d’une poursuite du tabagisme et non d’une exposition uniquement passive. Le patient convient qu’il continue son tabagisme sous forme de chicha.</p></div><div><h3>Discussion</h3><p>Dans ce contexte de consommation de chicha et devant cette HbCO augmentée, la question se pose du lien avec la polyglobulie secondaire de ce patient. En effet, l’hypoxie chronique est une cause avérée de polyglobulie. Un argument pour conforter cette hypothèse est l’amélioration de la polyglobulie constatée en 2022 contemporaine de la diminution de la consommation de chicha et une aggravation lors de la reprise d’une consommation plus importante <span><span>[1]</span></span>. Les données de la littérature, rapportent plusieurs cas de patients, utilisateurs de chicha, avec une polyglobulie (Hb à 20 g/dL et hématocrite entre 53 et 65 %). Pour ce cas clinique, si le sevrage tabagique est obtenu, il sera intéressant d’avoir le suivi de l’hématocrite et de l’hémoglobine afin de valider notre hypothèse de polyglobulie secondaire à l’exposition chronique à la chicha.</p></div><div><h3>Conclusion</h3><p>considérée à tort, par les utilisateurs, comme dénuée de risque, une meilleure information du public sur les risques aigus d’intoxication au monoxyde de carbone semble nécessaire. Moins décrite, la consommation chronique, lors d’une pratique intense, a fortiori dans des lieux mal ventilés, peut être responsable d’une intoxication chronique au monoxyde de carbone, avec comme conséquence de l’hypoxie chronique par l’intermédiaire d’une hémoglobine moins fonctionnelle, une polyglobulie secondaire. L’évoquer lors du bilan de polyglobulie peut être utile.</p></div>","PeriodicalId":23170,"journal":{"name":"Toxicologie Analytique et Clinique","volume":"36 3","pages":"Pages S99-S100"},"PeriodicalIF":1.8000,"publicationDate":"2024-09-10","publicationTypes":"Journal Article","fieldsOfStudy":null,"isOpenAccess":false,"openAccessPdf":"","citationCount":"0","resultStr":null,"platform":"Semanticscholar","paperid":null,"PeriodicalName":"Toxicologie Analytique et Clinique","FirstCategoryId":"1085","ListUrlMain":"https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S2352007824002117","RegionNum":0,"RegionCategory":null,"ArticlePicture":[],"TitleCN":null,"AbstractTextCN":null,"PMCID":null,"EPubDate":"","PubModel":"","JCR":"Q4","JCRName":"TOXICOLOGY","Score":null,"Total":0}
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Abstract
Objectif
Présenter et discuter une exposition chronique à la fumée de tabac à chicha.
Historique du cas
Patient 49 ans suivi en hématologie depuis 2019 pour une polyglobulie secondaire (hématocrite à 63 % et hémoglobine (Hb) à 22 g/dL). Le bilan étiologique de polyglobulie réalisé en 2019 retrouve une hypoxémie avec PaO2 à 74 mmHg, le reste du bilan est normal (bilan hépatique, vitamine B9, B12, sérologies hépatites et VIH, ferritine, TSH, érythropoïétine, absence de mutation JAK2V617F, recherche des gènes de l’hypoxie négative). L’échographie abdominale ne retrouve pas de splénomégalie et la biopsie médullaire retrouve une richesse augmentée pour l’âge, une discrète hyperplasie érythroblastique, l’immunomarquage est négatif. Le patient ne présente pas d’apnée du sommeil. Son traitement comprend de l’Aspégic 100 mg/j, la pratique régulière de saignées. À l’interrogatoire, une consommation tabagique régulière de chicha (narghilé) est notée depuis plus de 20 ans parfois jusqu’à 5 séances par jour. Il n’y a pas d’autre toxique consommé. En 2022, une amélioration de son état clinique et des paramètres biologiques est constatée avec une hémoglobine à 174 g/L et hématocrite à 53 % lors de la nette diminution de la consommation de chicha, permettant l’espacement des saignées : de tous les 2 mois à plus de 6 mois. Le 26 février 2024, la polyglobulie est à nouveau élevée avec une hémoglobine à 19 g/dL et un hématocrite à 56,2 %. Une gazométrie retrouve une carboxyhémoglobine (HbCO) à 14,7 %. Ce résultat motive le recours à un avis en pneumologie. Le 5 mars 2024, le contrôle de l’HbCO est de 18,9 %. Le patient rapporte un sevrage de toute forme de tabagisme mais fréquente toujours les bars à chichas à raison de plusieurs heures par semaine. Après avoir demandé au patient de ne plus fréquenter les bars à chichas, un contrôle biologique le 27/03/2024 retrouve une HbCO à 6 % (Normale < 2 %) témoignant d’une poursuite de l’exposition. Par ailleurs, la cotinine urinaire est à 660 μg/L (N < 100 μg/L lors du tabagisme passif). Ces résultats sont en faveur d’une poursuite du tabagisme et non d’une exposition uniquement passive. Le patient convient qu’il continue son tabagisme sous forme de chicha.
Discussion
Dans ce contexte de consommation de chicha et devant cette HbCO augmentée, la question se pose du lien avec la polyglobulie secondaire de ce patient. En effet, l’hypoxie chronique est une cause avérée de polyglobulie. Un argument pour conforter cette hypothèse est l’amélioration de la polyglobulie constatée en 2022 contemporaine de la diminution de la consommation de chicha et une aggravation lors de la reprise d’une consommation plus importante [1]. Les données de la littérature, rapportent plusieurs cas de patients, utilisateurs de chicha, avec une polyglobulie (Hb à 20 g/dL et hématocrite entre 53 et 65 %). Pour ce cas clinique, si le sevrage tabagique est obtenu, il sera intéressant d’avoir le suivi de l’hématocrite et de l’hémoglobine afin de valider notre hypothèse de polyglobulie secondaire à l’exposition chronique à la chicha.
Conclusion
considérée à tort, par les utilisateurs, comme dénuée de risque, une meilleure information du public sur les risques aigus d’intoxication au monoxyde de carbone semble nécessaire. Moins décrite, la consommation chronique, lors d’une pratique intense, a fortiori dans des lieux mal ventilés, peut être responsable d’une intoxication chronique au monoxyde de carbone, avec comme conséquence de l’hypoxie chronique par l’intermédiaire d’une hémoglobine moins fonctionnelle, une polyglobulie secondaire. L’évoquer lors du bilan de polyglobulie peut être utile.