C. Tournoud , D. Barraud , A. Lambert , C. Moulut , E. Puskarczyk
{"title":"Extravasation de N-Acetylcystéine : un risque particulier ?","authors":"C. Tournoud , D. Barraud , A. Lambert , C. Moulut , E. Puskarczyk","doi":"10.1016/j.toxac.2024.08.059","DOIUrl":null,"url":null,"abstract":"<div><h3>Objectif</h3><p>Présenter un cas grave d’extravasation de N-Acétylcystéine (NAC).</p></div><div><h3>Cas clinique</h3><p>Une femme de 59<!--> <!-->ans (85<!--> <!-->kg), aux antécédents de troubles dépressifs et d’intoxications médicamenteuses volontaires, est hospitalisée pour la prise en charge de l’ingestion volontaire de 40 g de paracétamol. Elle a présenté de nombreux vomissements avant l’admission. À l’admission (H20) la patiente est asymptomatique. Prélevé à H22, le bilan biologique met en évidence : paracétamolémie négative, ALAT 1226 UI/L (N × 35), ASAT 1053 UI/L (N × 35), TP 77 %. La patiente est mise sous NAC par voie intraveineuse à H24 de la prise médicamenteuse. À H48, l’aggravation de la cytolyse (ASAT et ALAT × 300<!--> <!-->N), TP 15 %, lactates 4 mmol/L, sans signes d’encéphalopathie, conduit au transfert de la patiente vers un centre de transplantation hépatique. L’hépatite aiguë va cependant régresser avec arrêt possible de la NAC à J5 de l’ingestion. Une extravasation de la perfusion de NAC est signalée devant l’apparition d’un œdème localisé à l’avant-bras, puis d’une dermabrasion étendue avec phlyctènes, évoluant vers une nécrose cutanée étendue d’environ 1 % de la surface cutanée, ayant nécessité une excision-greffe cutanée à J12 de l’admission.</p></div><div><h3>Discussion</h3><p>L’extravasation est la fuite de solutions perfusées hors du lit vasculaire dans les tissus environnants : les lésions tissulaires sont favorisées par la vasoconstriction locale, les mécanismes dépendants de la réactivité chimique de la solution, dont le pH est le reflet, de son pouvoir osmolaire et cytotoxique <span><span>[1]</span></span>. Les complications à type de nécrose cutanée localisée sont à redouter notamment lors d’extravasation d’antimitotiques. La N-Acétylcystéine est un des antidotes les plus utilisés dans les intoxications, surtout au paracétamol, mais aussi à d’autres hépatotoxiques (amanitines, diméthylformamide, etc.). L’administration intraveineuse de NAC peut entraîner des complications anaphylactoïdes bien connues associant flush, rash, prurit, et pouvant se compliquer d’un bronchospasme, d’un œdème de Quincke voire d’un choc anaphylactique. Cependant les cas d’extravasation sont rarement décrits : le résumé caractéristique du produit (RCP) de la forme injectable signale la possibilité de survenue d’un œdème local en cas d’extravasation. La NAC contient un radical soufré potentiellement irritant en cas de diffusion sous cutanée mais sans pour autant approcher le potentiel nécrotique des chimiothérapies. Son pH proche de la neutralité (6,5) devrait limiter les risques locaux. En dehors du cas décrit ici, la survenue d’un syndrome des loges dans ce contexte a été publié <span><span>[2]</span></span>.</p></div><div><h3>Conclusion</h3><p>La fréquence de l’utilisation par voie veineuse de cet antidote en service d’urgences ne doit pas faire banaliser les potentiels effets secondaires systémiques et localisés de la NAC, notamment en cas d’extravasation. Une surveillance attentive de la perfusion doit être réalisée en milieu de soins.</p></div>","PeriodicalId":23170,"journal":{"name":"Toxicologie Analytique et Clinique","volume":"36 3","pages":"Page S105"},"PeriodicalIF":1.8000,"publicationDate":"2024-09-10","publicationTypes":"Journal Article","fieldsOfStudy":null,"isOpenAccess":false,"openAccessPdf":"","citationCount":"0","resultStr":null,"platform":"Semanticscholar","paperid":null,"PeriodicalName":"Toxicologie Analytique et Clinique","FirstCategoryId":"1085","ListUrlMain":"https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S2352007824002208","RegionNum":0,"RegionCategory":null,"ArticlePicture":[],"TitleCN":null,"AbstractTextCN":null,"PMCID":null,"EPubDate":"","PubModel":"","JCR":"Q4","JCRName":"TOXICOLOGY","Score":null,"Total":0}
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Abstract
Objectif
Présenter un cas grave d’extravasation de N-Acétylcystéine (NAC).
Cas clinique
Une femme de 59 ans (85 kg), aux antécédents de troubles dépressifs et d’intoxications médicamenteuses volontaires, est hospitalisée pour la prise en charge de l’ingestion volontaire de 40 g de paracétamol. Elle a présenté de nombreux vomissements avant l’admission. À l’admission (H20) la patiente est asymptomatique. Prélevé à H22, le bilan biologique met en évidence : paracétamolémie négative, ALAT 1226 UI/L (N × 35), ASAT 1053 UI/L (N × 35), TP 77 %. La patiente est mise sous NAC par voie intraveineuse à H24 de la prise médicamenteuse. À H48, l’aggravation de la cytolyse (ASAT et ALAT × 300 N), TP 15 %, lactates 4 mmol/L, sans signes d’encéphalopathie, conduit au transfert de la patiente vers un centre de transplantation hépatique. L’hépatite aiguë va cependant régresser avec arrêt possible de la NAC à J5 de l’ingestion. Une extravasation de la perfusion de NAC est signalée devant l’apparition d’un œdème localisé à l’avant-bras, puis d’une dermabrasion étendue avec phlyctènes, évoluant vers une nécrose cutanée étendue d’environ 1 % de la surface cutanée, ayant nécessité une excision-greffe cutanée à J12 de l’admission.
Discussion
L’extravasation est la fuite de solutions perfusées hors du lit vasculaire dans les tissus environnants : les lésions tissulaires sont favorisées par la vasoconstriction locale, les mécanismes dépendants de la réactivité chimique de la solution, dont le pH est le reflet, de son pouvoir osmolaire et cytotoxique [1]. Les complications à type de nécrose cutanée localisée sont à redouter notamment lors d’extravasation d’antimitotiques. La N-Acétylcystéine est un des antidotes les plus utilisés dans les intoxications, surtout au paracétamol, mais aussi à d’autres hépatotoxiques (amanitines, diméthylformamide, etc.). L’administration intraveineuse de NAC peut entraîner des complications anaphylactoïdes bien connues associant flush, rash, prurit, et pouvant se compliquer d’un bronchospasme, d’un œdème de Quincke voire d’un choc anaphylactique. Cependant les cas d’extravasation sont rarement décrits : le résumé caractéristique du produit (RCP) de la forme injectable signale la possibilité de survenue d’un œdème local en cas d’extravasation. La NAC contient un radical soufré potentiellement irritant en cas de diffusion sous cutanée mais sans pour autant approcher le potentiel nécrotique des chimiothérapies. Son pH proche de la neutralité (6,5) devrait limiter les risques locaux. En dehors du cas décrit ici, la survenue d’un syndrome des loges dans ce contexte a été publié [2].
Conclusion
La fréquence de l’utilisation par voie veineuse de cet antidote en service d’urgences ne doit pas faire banaliser les potentiels effets secondaires systémiques et localisés de la NAC, notamment en cas d’extravasation. Une surveillance attentive de la perfusion doit être réalisée en milieu de soins.