Concentration urinaire faible d’une substance inscrite sur la liste de la WADA : discrimination entre une fin d’excrétion à visée dopante et une contamination. Stratégie basée sur l’analyse de cheveux ou d’ongles
{"title":"Concentration urinaire faible d’une substance inscrite sur la liste de la WADA : discrimination entre une fin d’excrétion à visée dopante et une contamination. Stratégie basée sur l’analyse de cheveux ou d’ongles","authors":"Pascal Kintz , Laurie Gheddar , Nadia Arbouche , Alice Ameline","doi":"10.1016/j.toxac.2024.03.038","DOIUrl":null,"url":null,"abstract":"<div><h3>Objectifs</h3><p>Une concentration urinaire faible (autour de 1<!--> <!-->ng/mL) mesurée lors d’un contrôle antidopage peut s’interpréter de 2 façons. Pour les professionnels de l’antidopage (WADA, ITIA, USADA, AFLD, UEFA …) il s’agit d’un résultat analytique anormal, correspondant à la fin d’élimination d’un agent dopant consommé pour ses propriétés sur la performance. Pour le sportif qui conteste toute triche, il s’agit des conséquences d’une contamination. Par contamination, on entend la présence non intentionnelle et non connue d’un agent dopant, comme dans de la viande, les œufs, des compléments alimentaires, des médicaments non conformes ou encore un transfert lors d’une relation intime (Kintz, Med Sci Law 2024;64:72-76).</p></div><div><h3>Méthode</h3><p>Trois types d’éléments sont généralement mis à notre disposition : 1. le LDP (laboratory documentation package) ou livret de vie de l’échantillon analysé par le laboratoire accrédité par la WADA–c’est la traçabilité - et des documents complémentaires, explications des 2 parties mais surtout de l’athlète ; 2. des compléments alimentaires et des médicaments consommés autour de la période du contrôle urinaire ; et 3. des cheveux, des poils ou des ongles couvrant la période du contrôle urinaire. L’approche stratégique a été définie dans le passé (Kintz, J Anal Toxicol, 2021;45:e3-e5).</p></div><div><h3>Résultats</h3><p>Dans tous les cas, le sportif reste responsable de l’ensemble des éléments consommés, alimentation y-comprise et de ses activités. Lors d’une contestation argumentée, les autorités de l’antidopage mettent ensuite en perspectives les explications avancées par les sportifs et leurs experts pour évaluer leur cohérence et, généralement les rejeter, se réfugiant derrière des dispositions du code mondial. La situation de no fault or negligence, qui seule permet l’exonération d’une période d’inéligibilité est très compliquée à faire admettre. On rentre alors dans un domaine de la mauvaise foi (transposition à l’homme d’études animales, rapports secrets et non publiés, rejet catégorique des analyses complémentaires …). Il s’agit d’un domaine riche de spéculation, tant les études contrôlées manquent et sont très difficiles à mettre en place. Quoiqu’il en soit, la décision finale est très dépendante du tribunal ou de l’instance par laquelle l’athlète a été jugé tant les arguments scientifiques ou pseudo-scientifiques peuvent avoir des poids différents selon les juges, les avocats et les experts du moment.</p><p>Les exemples suivants où les sportifs ont été blanchis seront détaillés lors de la présentation : contamination par la viande (trenbolone, boldenone), par des œufs (clomifene), par des compléments alimentaires (trimétazidine, ostarine, molidustat, methastérone), par le même accessoire sportif porté par 2 personnes (ostarine) ou lors de relation intime (cocaïne, mesterolone, ostarine, ligandrol, GW1516).</p></div><div><h3>Conclusion</h3><p>La reconnaissance par les autorités de l’antidopage d’une contamination est une situation longue et fastidieuse. Qui se souvient exactement de ce qu’il a consommé ou fait précisément plusieurs mois auparavant ? C’est également un processus fort couteux, les avocats devant vérifier un nombre incroyable de données. Pour le toxicologue qui s’implique dans la défense, la décision finale est parfois très frustrante. Par exemple, l’UCI et l’AFLD ont récemment refusé de reconnaître la preuve apportée par l’analyse négative des cheveux (LOQ à 1<!--> <!-->pg/mg) de 2 sportifs ayant un résultat anormal pour le létrozole, étant entendu qu’une dose unique de ce médicament donne une réponse de l’ordre de 60<!--> <!-->pg/mg (Favretto et al. Drug Test Anal 2019;11:762-771) alors qu’on mesure plus de 250<!--> <!-->pg/mg chez un sujet reconnaissant en consommer (Ameline et al. J Chromatogr B 2021;1162:122495).</p><p>L’équité sportive devrait aussi passer par une profonde remise en question des autorités de l’antidopage en regard de leur approche du phénomène de contamination.</p></div>","PeriodicalId":23170,"journal":{"name":"Toxicologie Analytique et Clinique","volume":"36 2","pages":"Pages S28-S29"},"PeriodicalIF":1.8000,"publicationDate":"2024-05-16","publicationTypes":"Journal Article","fieldsOfStudy":null,"isOpenAccess":false,"openAccessPdf":"","citationCount":"0","resultStr":null,"platform":"Semanticscholar","paperid":null,"PeriodicalName":"Toxicologie Analytique et Clinique","FirstCategoryId":"1085","ListUrlMain":"https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S235200782400060X","RegionNum":0,"RegionCategory":null,"ArticlePicture":[],"TitleCN":null,"AbstractTextCN":null,"PMCID":null,"EPubDate":"","PubModel":"","JCR":"Q4","JCRName":"TOXICOLOGY","Score":null,"Total":0}
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Abstract
Objectifs
Une concentration urinaire faible (autour de 1 ng/mL) mesurée lors d’un contrôle antidopage peut s’interpréter de 2 façons. Pour les professionnels de l’antidopage (WADA, ITIA, USADA, AFLD, UEFA …) il s’agit d’un résultat analytique anormal, correspondant à la fin d’élimination d’un agent dopant consommé pour ses propriétés sur la performance. Pour le sportif qui conteste toute triche, il s’agit des conséquences d’une contamination. Par contamination, on entend la présence non intentionnelle et non connue d’un agent dopant, comme dans de la viande, les œufs, des compléments alimentaires, des médicaments non conformes ou encore un transfert lors d’une relation intime (Kintz, Med Sci Law 2024;64:72-76).
Méthode
Trois types d’éléments sont généralement mis à notre disposition : 1. le LDP (laboratory documentation package) ou livret de vie de l’échantillon analysé par le laboratoire accrédité par la WADA–c’est la traçabilité - et des documents complémentaires, explications des 2 parties mais surtout de l’athlète ; 2. des compléments alimentaires et des médicaments consommés autour de la période du contrôle urinaire ; et 3. des cheveux, des poils ou des ongles couvrant la période du contrôle urinaire. L’approche stratégique a été définie dans le passé (Kintz, J Anal Toxicol, 2021;45:e3-e5).
Résultats
Dans tous les cas, le sportif reste responsable de l’ensemble des éléments consommés, alimentation y-comprise et de ses activités. Lors d’une contestation argumentée, les autorités de l’antidopage mettent ensuite en perspectives les explications avancées par les sportifs et leurs experts pour évaluer leur cohérence et, généralement les rejeter, se réfugiant derrière des dispositions du code mondial. La situation de no fault or negligence, qui seule permet l’exonération d’une période d’inéligibilité est très compliquée à faire admettre. On rentre alors dans un domaine de la mauvaise foi (transposition à l’homme d’études animales, rapports secrets et non publiés, rejet catégorique des analyses complémentaires …). Il s’agit d’un domaine riche de spéculation, tant les études contrôlées manquent et sont très difficiles à mettre en place. Quoiqu’il en soit, la décision finale est très dépendante du tribunal ou de l’instance par laquelle l’athlète a été jugé tant les arguments scientifiques ou pseudo-scientifiques peuvent avoir des poids différents selon les juges, les avocats et les experts du moment.
Les exemples suivants où les sportifs ont été blanchis seront détaillés lors de la présentation : contamination par la viande (trenbolone, boldenone), par des œufs (clomifene), par des compléments alimentaires (trimétazidine, ostarine, molidustat, methastérone), par le même accessoire sportif porté par 2 personnes (ostarine) ou lors de relation intime (cocaïne, mesterolone, ostarine, ligandrol, GW1516).
Conclusion
La reconnaissance par les autorités de l’antidopage d’une contamination est une situation longue et fastidieuse. Qui se souvient exactement de ce qu’il a consommé ou fait précisément plusieurs mois auparavant ? C’est également un processus fort couteux, les avocats devant vérifier un nombre incroyable de données. Pour le toxicologue qui s’implique dans la défense, la décision finale est parfois très frustrante. Par exemple, l’UCI et l’AFLD ont récemment refusé de reconnaître la preuve apportée par l’analyse négative des cheveux (LOQ à 1 pg/mg) de 2 sportifs ayant un résultat anormal pour le létrozole, étant entendu qu’une dose unique de ce médicament donne une réponse de l’ordre de 60 pg/mg (Favretto et al. Drug Test Anal 2019;11:762-771) alors qu’on mesure plus de 250 pg/mg chez un sujet reconnaissant en consommer (Ameline et al. J Chromatogr B 2021;1162:122495).
L’équité sportive devrait aussi passer par une profonde remise en question des autorités de l’antidopage en regard de leur approche du phénomène de contamination.