Nicolas Fabresse , Lucas Bertaina , Liselotte Pochard , Jean-Claude Alvarez , Anthony Faivre , Barbara Buono , Stéphane Cerantola , Gaëlle Simon , Natalia Doudka , Anne-Laure Pelissier , Marie Carles , Caroline Solas
{"title":"Deux cas d’intoxication au delta-9-tetrahydrocannabiphorol (THCP), un nouveau cannabinoïde semi-synthétique","authors":"Nicolas Fabresse , Lucas Bertaina , Liselotte Pochard , Jean-Claude Alvarez , Anthony Faivre , Barbara Buono , Stéphane Cerantola , Gaëlle Simon , Natalia Doudka , Anne-Laure Pelissier , Marie Carles , Caroline Solas","doi":"10.1016/j.toxac.2024.03.066","DOIUrl":null,"url":null,"abstract":"<div><h3>Objectifs</h3><p>Nous rapportons les premiers cas d’intoxication au delta-9-tétrahydrocannabiphorol (THCP) suite à une consommation d’huiles par voie orale dans un cadre récréatif.</p></div><div><h3>Méthode</h3><p>Dans la nuit du 07/12/2023, une femme de 42 ans consomme avec sa compagne de 36 ans 2 gouttes de 2 huiles : la première étiquetée cannabidiol (CBD) 4 %, et la seconde THCP 10 000<!--> <!-->mg, toutes deux achetées dans le commerce. Les screening toxicologiques (sang, urine ainsi que les huiles consommées) ont été réalisés par LC-HRMS (Orbitrap Exploris 120, Thermo) selon une méthode précédemment publiée (Orbitrap Exploris 120, Thermo) (Becam<!--> <!-->J. et al. J Chromatogr B 2023;1224:123739). Les huiles consommées ont également été analysées en chromatographie en phase gazeuse (CG: 7890A, SM: Agilent 5975<!--> <!-->C, Agilent). L’huile identifiée THCP a également été analysé en RMN (Bruker Avance III™ HD 500<!--> <!-->MHz).</p></div><div><h3>Résultats</h3><p>Dans la nuit suivant l’ingestion, la première patiente présente des nausées, vomissements et vertiges l’amenant à consulter au service médical des urgences. À l’arrivée elle présente une mydriase partiellement réactive avec une hypertonie spastique majeure. Elle se dégrade progressivement sur le plan neurologique avec un score Glasgow (GCS)<!--> <!-->=<!--> <!-->10, et une lactatémie à 3<!--> <!-->mmol/L (VN<!--> <!-->=<!--> <!-->0,5–1,5<!--> <!-->mmol/L). L’électroencéphalogramme présente une allure encéphalopathique malgré une imagerie cérébrale normale. Elle est transférée en unité de neurologie d’où elle sortira le 12/12/2023 devant la résolution complète des troubles neurologiques. En parallèle, sa compagne est également admise dans le service des urgences, elle présente un tableau neurologique de troubles de la vigilance (GCS<!--> <!-->=<!--> <!-->13), obnubilation, raideur nucale, syndrome pyramidal, trépidations épileptoïdes des membres inférieurs, apraxie fine et perte de force. L’EEG témoigne d’un phénomène encéphalopathique. La patiente est transférée en unité de soins intensifs psychiatriques. Elle est d’humeur fluctuante, agitée, présente une écholalie avec rires non motivés, des chants inadaptés et comportement anormal ayant nécessité l’administration de cyamémazine. Le 11/12, elle présente un tableau d’allure psychiatrique avec hypomanie et agitation, motivant un transfert en psychiatrie le 12/12. Les criblages toxicologiques réalisés en LC-HRMS retrouvent la présence de CBD dans l’huile de CBD uniquement (non détecté dans l’urine et le sang, LOD<!--> <!-->=<!--> <!-->0,5<!--> <!-->ng/mL), les autres échantillons sont négatifs. Le THCP est absent des bibliothèques utilisées dans le cadre de ces retraitements (mzCloud™, NIST LC-HRMS, HighResNPS). L’analyse réalisée en RMN révèle la présence de THCP à une teneur de 12 % dans l’huile correspondante. Les concentrations plasmatiques en THCP sont de 12,1<!--> <!-->ng/mL pour la première patiente et 11,9<!--> <!-->ng/mL pour la seconde. Il n’a pas été détecté dans les urines (LOD<!--> <!-->=<!--> <!-->0,5<!--> <!-->ng/mL).</p></div><div><h3>Conclusion</h3><p>Le THCP est naturellement présent à l’état de traces dans le cannabis. Il possède une affinité respectivement 30 et 5,8 fois supérieure pour les récepteurs CB1 et CB2 comparativement au THC (Bueno<!--> <!-->J. et al. J Nat Prod 2021;84:531-536). Structurellement, le THCP possède une chaîne alkyle plus longue de deux carbones, à l’origine de l’affinité plus élevée pour les récepteurs cannabinoïdes. L’absence actuelle de règlementation est à l’origine de la commercialisation de produits légaux, labellisés THCP, alléguant des effets proches de ceux du cannabis comme précédemment pour l’hexahydrocannabinol et ses analogues, mais présentant des effets neuro-psychiatriques sévères.</p></div>","PeriodicalId":23170,"journal":{"name":"Toxicologie Analytique et Clinique","volume":"36 2","pages":"Page S45"},"PeriodicalIF":1.8000,"publicationDate":"2024-05-16","publicationTypes":"Journal Article","fieldsOfStudy":null,"isOpenAccess":false,"openAccessPdf":"","citationCount":"0","resultStr":null,"platform":"Semanticscholar","paperid":null,"PeriodicalName":"Toxicologie Analytique et Clinique","FirstCategoryId":"1085","ListUrlMain":"https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S235200782400088X","RegionNum":0,"RegionCategory":null,"ArticlePicture":[],"TitleCN":null,"AbstractTextCN":null,"PMCID":null,"EPubDate":"","PubModel":"","JCR":"Q4","JCRName":"TOXICOLOGY","Score":null,"Total":0}
引用次数: 0
Abstract
Objectifs
Nous rapportons les premiers cas d’intoxication au delta-9-tétrahydrocannabiphorol (THCP) suite à une consommation d’huiles par voie orale dans un cadre récréatif.
Méthode
Dans la nuit du 07/12/2023, une femme de 42 ans consomme avec sa compagne de 36 ans 2 gouttes de 2 huiles : la première étiquetée cannabidiol (CBD) 4 %, et la seconde THCP 10 000 mg, toutes deux achetées dans le commerce. Les screening toxicologiques (sang, urine ainsi que les huiles consommées) ont été réalisés par LC-HRMS (Orbitrap Exploris 120, Thermo) selon une méthode précédemment publiée (Orbitrap Exploris 120, Thermo) (Becam J. et al. J Chromatogr B 2023;1224:123739). Les huiles consommées ont également été analysées en chromatographie en phase gazeuse (CG: 7890A, SM: Agilent 5975 C, Agilent). L’huile identifiée THCP a également été analysé en RMN (Bruker Avance III™ HD 500 MHz).
Résultats
Dans la nuit suivant l’ingestion, la première patiente présente des nausées, vomissements et vertiges l’amenant à consulter au service médical des urgences. À l’arrivée elle présente une mydriase partiellement réactive avec une hypertonie spastique majeure. Elle se dégrade progressivement sur le plan neurologique avec un score Glasgow (GCS) = 10, et une lactatémie à 3 mmol/L (VN = 0,5–1,5 mmol/L). L’électroencéphalogramme présente une allure encéphalopathique malgré une imagerie cérébrale normale. Elle est transférée en unité de neurologie d’où elle sortira le 12/12/2023 devant la résolution complète des troubles neurologiques. En parallèle, sa compagne est également admise dans le service des urgences, elle présente un tableau neurologique de troubles de la vigilance (GCS = 13), obnubilation, raideur nucale, syndrome pyramidal, trépidations épileptoïdes des membres inférieurs, apraxie fine et perte de force. L’EEG témoigne d’un phénomène encéphalopathique. La patiente est transférée en unité de soins intensifs psychiatriques. Elle est d’humeur fluctuante, agitée, présente une écholalie avec rires non motivés, des chants inadaptés et comportement anormal ayant nécessité l’administration de cyamémazine. Le 11/12, elle présente un tableau d’allure psychiatrique avec hypomanie et agitation, motivant un transfert en psychiatrie le 12/12. Les criblages toxicologiques réalisés en LC-HRMS retrouvent la présence de CBD dans l’huile de CBD uniquement (non détecté dans l’urine et le sang, LOD = 0,5 ng/mL), les autres échantillons sont négatifs. Le THCP est absent des bibliothèques utilisées dans le cadre de ces retraitements (mzCloud™, NIST LC-HRMS, HighResNPS). L’analyse réalisée en RMN révèle la présence de THCP à une teneur de 12 % dans l’huile correspondante. Les concentrations plasmatiques en THCP sont de 12,1 ng/mL pour la première patiente et 11,9 ng/mL pour la seconde. Il n’a pas été détecté dans les urines (LOD = 0,5 ng/mL).
Conclusion
Le THCP est naturellement présent à l’état de traces dans le cannabis. Il possède une affinité respectivement 30 et 5,8 fois supérieure pour les récepteurs CB1 et CB2 comparativement au THC (Bueno J. et al. J Nat Prod 2021;84:531-536). Structurellement, le THCP possède une chaîne alkyle plus longue de deux carbones, à l’origine de l’affinité plus élevée pour les récepteurs cannabinoïdes. L’absence actuelle de règlementation est à l’origine de la commercialisation de produits légaux, labellisés THCP, alléguant des effets proches de ceux du cannabis comme précédemment pour l’hexahydrocannabinol et ses analogues, mais présentant des effets neuro-psychiatriques sévères.