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Abstract
« La tâche des historiens de demain, s’il en existe encore, sera d’ecrire l’histoire comme une “histoire des sentiments”. »Gunther Anders, Aimer hier, Actes Sud, 2012, p. 13. Au contact du passeQu’elle soit connaissance rationnelle des evenements du passe, agencement des faits dans un recit coherent ou intelligibilite de processus de sociaux, l’histoire est peut-etre plus immediatement une maniere d’etre sensible a ce qui a disparu a jamais et dont nous possedons encore des « restes » (objets, discours, monuments, etc.) qui nous parlent, directement ou indirectement, de facons de vivre l’existence humaine. L’experience vive de l’historien consiste d’abord (meme si on l’oublie sous les effets de connaissance scientifique) a se sentir touche par ces existences d’autrefois, par ce qui a pu se passer. Il s’agit d’une experience d’autant plus intense que la modernite a plutot distendu les liens de chaque present avec le passe : nous vivons le passe comme une enigme. Ce sont les etrangetes des existences anciennes qui nous frappent ; ce sont elles dont l’historien est cense rendre compte. Il est devenu notre « expert es passe ». L’historien doit nous donner acces a ce qui n’offre plus d’evidence, tout en nous en faisant faire l’experience comme autre de ce que nous connaissons aujourd’hui. Nous avons beau trouver chez Herodote et Thucydide les sources de l’historiographie, ils n’eprouvaient pas ce sentiment de distance avec le passe, ils n’ecrivaient pas pour combler ou reproduire