Vers un anthropomorphisme critique

A travers quelques exemples issus de la litterature de langue allemande, cet article se propose de deconstruire la notion d’anthropomorphisme (appliquee aux animaux), voire de la rehabiliter dans le sens d’un usage critique. Pour ce faire, les approches theoriques issues de deux champs de recherche seront mobilisees : l’anthropologie de la nature et le Nouveau Materialisme. On montrera dans un premier temps comment la these du pluralisme ontologique formulee par Philippe Descola peut amener a un usage critique de la notion d’anthropomorphisme dans les etudes litteraires et culturelles, celle-ci se presentant differemment dans le cadre d’une ontologie non naturaliste comme l’analogisme, et perdant meme toute raison d’etre dans le contexte d’une ontologie de la nature comme l’animisme. On analysera ensuite comment la notion de forme (morphḗ) a pu etre retravaillee, chez Goethe notamment, dans le sens d’un anthropomorphisme de questionnement, avant de mettre en evidence, a la lumiere de la ballade de Friedrich Durrenmatt Minotaurus, a quel point il est difficile d’echapper a l’anthropomorphisme dans le cadre du naturalisme. Enfin il s’agira de voir, en s’appuyant sur quelques recits de Kafka, en quoi l’anthropos de l’anthropomorphisme, ainsi que la relation sujet-objet qu’il presuppose, ont fait l’objet d’une deconstruction en regle dans le cadre du Nouveau Materialisme, amenant a repenser completement la notion d’anthropomorphisme.