Écrire avec et contre les voix des autres dans Philippe de Camille Laurens

Abstract:Cet article s'intéresse à la façon dont l'auteure de Philippe écrit sur la naissance et la mort de son fils lorsque le savoir fait défaut. Selon notre hypothèse, chez Camille Laurens, la démarche consistant à « entendre le monde » en travaillant à partir de sources, c'est-à-dire en écrivant avec les « voix » que laissent percevoir différents documents—et, dans certains cas, contre elles—, lui permettrait d'appeler, implicitement ou explicitement, à la participation cognitive et affective du lectorat dans le processus de recherche tel qu'il est raconté en détail dans le récit. Pour vérifier cette hypothèse, nous nous penchons d'abord sur le conflit entre le désir d'oubli chez les autres et le projet de Laurens d'enquêter sur la mort en question. Ensuite, nous étudions comment l'usage des sources contribue à l'écriture de Philippe. Enfin, nous analysons comment ce récit, ressemblant en partie à un texte informatif, permet à Laurens de « s'engage[r] dans une entreprise de vérité […] qui tient du dévoilement » et, ce faisant, d'avoir potentiellement un impact émotionnel sur les lecteurs et lectrices.