Esoteric Islam in Modern French Thought: Massignon, Corbin, Jambet by Ziad Elmarsafy (review)

une approche intersectionnelle, qui chercherait à tenir compte de l’expérience vécue des personnes, et des différents niveaux de discrimination dont elles peuvent être victimes dans un contexte social donné. Il en va ainsi par exemple d’Annie Leclerc qui, dans Parole de femme (Paris: Grasset, 1974), représente la grossesse comme une expérience résolument positive, libératrice et créative. Tomlinson propose, à l’aide de critiques de cette pensée universalisante telles que Christine Delphy, Gayatri Chakravorty Spivak ou encore Chandra Talpade Mohanty, et d’études sociologiques spécifiques à chacun des contextes, de réfléchir à l’héritage de la deuxième vague dans les œuvres d’un nombre d’autrices contemporaines, en cherchant à déterminer si les écrivaines étudiées adoptent une perspective intersectionnelle dans leur traitement du cycle reproducteur féminin. Elle démontre ainsi que de nombreux traits du féminisme de la deuxième vague française se retrouvent dans ces récits, qui adoptent en même temps une approche plus située dans le contexte social représenté dans chaque œuvre. L’exemple du traitement de la ménopause est particulièrement intéressant, car il est l’un des aspects les plus originaux de l’ouvrage. Tomlinson explique que très peu d’intérêt est accordé au phénomène dans les écrits de la deuxième vague; et Leclerc et Marie Cardinal reproduisent même la perception négative traditionnellement associée au phénomène lorsqu’elles l’évoquent dans Autrement dit (Paris: Grasset, 1977). Elle note que la ménopause demeure la grande absente des œuvres d’autrices contemporaines, suggérant une adhésion persistante aux clichés sexistes qui la caractérisent. Elle souligne néanmoins que des représentations plus nuancées de la ménopause existent, notamment dans Bleu blanc vert (2007) et Hizya (2015) de Bey, qui présentent l’expérience de la ménopause comme influencée par le contexte social des personnages, et même comme une libération pour certaines des héroı̈nes mises en scène, cherchant ainsi à subvertir le tabou qui demeure dans la société algérienne. La critique principale adressée aux féministes de la deuxième vague dans l’ouvrage (et ailleurs) est une tendance à porter un regard monolithique sur les questions féministes; or, on pourrait arguer que l’ouvrage reproduit parfois la même tendance en présentant la deuxième vague comme un bloc univoque. Néanmoins, la richesse, l’érudition et l’originalité de l’étude sont tout à fait remarquables, et le style abordable du texte, en fera un outil précieux et accessible pour les étudiant e s autant que pour les spécialistes.