{"title":"Iconic virtues of diagrams","authors":"B. Leclercq","doi":"10.4000/SIGNATA.2286","DOIUrl":null,"url":null,"abstract":"A l’oppose d’Emmanuel Kant, dont la Critique de la raison pure soutenait que, fondes sur les formes memes de l’intuition sensible, les jugements arithmetiques et geometriques sont tout a la fois synthetiques (donc informatifs) et vrais a priori, Bernard Bolzano, et a sa suite tout le courant logiciste (de Frege a Carnap), affirme que seule l’analyse logico-conceptuelle est susceptible de fonder la generalite des enonces et demonstrations mathematiques.Quoiqu’etant lui aussi un des peres de la logique formelle contemporaine, Charles Sanders Peirce fournit pour sa part des motifs semiotiques de penser que Kant avait raison et que les diagrammes sont bien vecteurs de significations generales qui leur permettent de fonder des connaissances necessaires et neanmoins non triviales. Contrairement a leur simple analyse logique, la representation visuelle des concepts dans des schemes ou diagrammes favorise l’exploration de ces concepts en mettant en evidence certains de leurs « a cote » tant et si bien qu’un savoir nouveau est engrange : « diagrams evolve what was involved ». C’est pourquoi, conformement a l’idee kantienne de construction intuitive, la demarche mathematique inferentielle n’est pas purement deductive mais bien inventive et amplificatrice (ampliative).Apres avoir brievement rappele les termes du debat autour du caractere analytique ou synthetique a priori des mathematiques, l’article s’efforce d’identifier les vertus iconiques des diagrammes qui expliquent cette productivite epistemologique aux yeux de Peirce.Un premier element tient dans la nature « formelle » des icones, qui leur permet d’exprimer les relations syntaxiques entre composantes descriptives (symboles) et demonstratives (indices) d’informations structurees. A cet egard, dit Peirce, meme les expressions algebriques ou ideographiques sont des icones faisant apparaitre une forme generale – le « rheme » – dans laquelle les places des indices peuvent etre occupees par des variables « x » ou « y » ayant valeur d’« individu quelconque ». C’est pourquoi, meme s’ils sont toujours singuliers, les diagrammes sont des « abstractions » au sens ou ils representent, non des termes singuliers, mais leurs rapports.C’est alors seulement dans cette premiere perspective qu’apparait clairement l’interet de ce second element essentiel des diagrammes, a savoir leur bi-dimensionnalite, qui permet d’exhiber des relations nettement plus complexes que pourraient le faire des expressions linguistiques lineaires. Cet aspect, sur laquelle la semiotique visuelle a beaucoup insiste, doit imperativement etre compris a la lumiere (semiotico-logique) du precedent.Enfin, troisiemement, il importe de mesurer le role de la dimension imaginaire, non referentielle, des diagrammes. Les icones connotent sans denoter. Et c’est pourquoi elles peuvent etre informatives sans que ces informations se limitent a porter sur des individus singuliers. Bien plus, cette dimension non referentielle des icones est ce qui leur permet de se preter a des manipulations exploratoires virtuelles permettant d’envisager et d’investiguer des possibilites qui a leur tour nous renseignent sur des proprietes non apparentes de la configuration actuellement visible.","PeriodicalId":36048,"journal":{"name":"Signata","volume":"107 12 1","pages":""},"PeriodicalIF":0.0000,"publicationDate":"2019-06-30","publicationTypes":"Journal Article","fieldsOfStudy":null,"isOpenAccess":false,"openAccessPdf":"","citationCount":"2","resultStr":null,"platform":"Semanticscholar","paperid":null,"PeriodicalName":"Signata","FirstCategoryId":"1085","ListUrlMain":"https://doi.org/10.4000/SIGNATA.2286","RegionNum":0,"RegionCategory":null,"ArticlePicture":[],"TitleCN":null,"AbstractTextCN":null,"PMCID":null,"EPubDate":"","PubModel":"","JCR":"Q4","JCRName":"Arts and Humanities","Score":null,"Total":0}
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Abstract
A l’oppose d’Emmanuel Kant, dont la Critique de la raison pure soutenait que, fondes sur les formes memes de l’intuition sensible, les jugements arithmetiques et geometriques sont tout a la fois synthetiques (donc informatifs) et vrais a priori, Bernard Bolzano, et a sa suite tout le courant logiciste (de Frege a Carnap), affirme que seule l’analyse logico-conceptuelle est susceptible de fonder la generalite des enonces et demonstrations mathematiques.Quoiqu’etant lui aussi un des peres de la logique formelle contemporaine, Charles Sanders Peirce fournit pour sa part des motifs semiotiques de penser que Kant avait raison et que les diagrammes sont bien vecteurs de significations generales qui leur permettent de fonder des connaissances necessaires et neanmoins non triviales. Contrairement a leur simple analyse logique, la representation visuelle des concepts dans des schemes ou diagrammes favorise l’exploration de ces concepts en mettant en evidence certains de leurs « a cote » tant et si bien qu’un savoir nouveau est engrange : « diagrams evolve what was involved ». C’est pourquoi, conformement a l’idee kantienne de construction intuitive, la demarche mathematique inferentielle n’est pas purement deductive mais bien inventive et amplificatrice (ampliative).Apres avoir brievement rappele les termes du debat autour du caractere analytique ou synthetique a priori des mathematiques, l’article s’efforce d’identifier les vertus iconiques des diagrammes qui expliquent cette productivite epistemologique aux yeux de Peirce.Un premier element tient dans la nature « formelle » des icones, qui leur permet d’exprimer les relations syntaxiques entre composantes descriptives (symboles) et demonstratives (indices) d’informations structurees. A cet egard, dit Peirce, meme les expressions algebriques ou ideographiques sont des icones faisant apparaitre une forme generale – le « rheme » – dans laquelle les places des indices peuvent etre occupees par des variables « x » ou « y » ayant valeur d’« individu quelconque ». C’est pourquoi, meme s’ils sont toujours singuliers, les diagrammes sont des « abstractions » au sens ou ils representent, non des termes singuliers, mais leurs rapports.C’est alors seulement dans cette premiere perspective qu’apparait clairement l’interet de ce second element essentiel des diagrammes, a savoir leur bi-dimensionnalite, qui permet d’exhiber des relations nettement plus complexes que pourraient le faire des expressions linguistiques lineaires. Cet aspect, sur laquelle la semiotique visuelle a beaucoup insiste, doit imperativement etre compris a la lumiere (semiotico-logique) du precedent.Enfin, troisiemement, il importe de mesurer le role de la dimension imaginaire, non referentielle, des diagrammes. Les icones connotent sans denoter. Et c’est pourquoi elles peuvent etre informatives sans que ces informations se limitent a porter sur des individus singuliers. Bien plus, cette dimension non referentielle des icones est ce qui leur permet de se preter a des manipulations exploratoires virtuelles permettant d’envisager et d’investiguer des possibilites qui a leur tour nous renseignent sur des proprietes non apparentes de la configuration actuellement visible.