{"title":"L’identité de Sidé. Entre vérité et réalisme politique: de la légende à l’histoire et à la langue","authors":"C. Brixhe","doi":"10.1515/kadmos-2018-0009","DOIUrl":null,"url":null,"abstract":"Abstract Avec le cas de Sidé, on constate que l’identité affichée par une communauté est chose complexe et mouvante. La partie orientale de la Pamphylie, au-delà de l’Eurymedon, avait échappé à la colonisation grecque. Commencée à la fin du IIe millénaire et connaissant plusieurs vagues, celle-ci avait imposé, à l’ouest du fleuve, un grec mâtiné de la langue indigène postlouvite. A l’est, sur le territoire de Sidé celle-ci est restée langue légitime. Lorsqu’Aspendos, à l’ouest et Sidé à l’est émergent dans l’histoiré, une solide inimitié semble les opposer: Sidé affirme son anatolité et, à en croire les bribes historiographiques qui nous sont parvenues, en cas de conflit les deux cités ne sont jamais dans le même camp. A partir de l’époque classique sans doute, cette inimitié est stimulée par une rivalité économique. L’aversion des Sidètes pour leurs voisins hellènes ou hellénisés ne les empêche pas d’être très sensibles aux atouts économiques et culturels de ces derniers. Ils leur font de multiples emprunts. Celui qui illustre le mieux cette attitude qui mêle aversion et attraction est l’écriture dont ils dotent leur langue: leur alphabet, comme le grec, note les voyelles, mais pour les caractères ils imaginent le plus souvent des traces aussi différents que possible de ceux de leurs correspondants grecs. Cet anatolisme virulent ne faisait pas problème tant que la Pamphylie n’appartenait pas au monde grec. La situation changea avec la conquête macédonienne. C’est très probablement alors que surgit le récit qui faisait de Sidé une colonie de Kymé d’Eolide. Ce récit rattachait Side au moins partiellement au monde grec. Or rien, ni a Side ni a Kyme, ne le confirme: sans doute un des nombreux mythes qui apparurent, surtout a partir de l’époque hellénistique, pour installer une cite dans l’histoire grecque. Avec l’arrivee d’Alexandre (334 a. C.), le sidétique ne perdit pas immédiatement sa légitimité et il fut écrit jusqu’au tournant du IIIe au IIe siècle. Mais les bilingues qu’il nous a laissées et la forme sidétique des anthroponymes grecs montrent que les Sidètes s’emparèrent rapidement de la koiné grecque.","PeriodicalId":38825,"journal":{"name":"Kadmos","volume":"30 1","pages":"137 - 174"},"PeriodicalIF":0.0000,"publicationDate":"2018-06-01","publicationTypes":"Journal Article","fieldsOfStudy":null,"isOpenAccess":false,"openAccessPdf":"","citationCount":"0","resultStr":null,"platform":"Semanticscholar","paperid":null,"PeriodicalName":"Kadmos","FirstCategoryId":"1085","ListUrlMain":"https://doi.org/10.1515/kadmos-2018-0009","RegionNum":0,"RegionCategory":null,"ArticlePicture":[],"TitleCN":null,"AbstractTextCN":null,"PMCID":null,"EPubDate":"","PubModel":"","JCR":"Q2","JCRName":"Arts and Humanities","Score":null,"Total":0}
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Abstract
Abstract Avec le cas de Sidé, on constate que l’identité affichée par une communauté est chose complexe et mouvante. La partie orientale de la Pamphylie, au-delà de l’Eurymedon, avait échappé à la colonisation grecque. Commencée à la fin du IIe millénaire et connaissant plusieurs vagues, celle-ci avait imposé, à l’ouest du fleuve, un grec mâtiné de la langue indigène postlouvite. A l’est, sur le territoire de Sidé celle-ci est restée langue légitime. Lorsqu’Aspendos, à l’ouest et Sidé à l’est émergent dans l’histoiré, une solide inimitié semble les opposer: Sidé affirme son anatolité et, à en croire les bribes historiographiques qui nous sont parvenues, en cas de conflit les deux cités ne sont jamais dans le même camp. A partir de l’époque classique sans doute, cette inimitié est stimulée par une rivalité économique. L’aversion des Sidètes pour leurs voisins hellènes ou hellénisés ne les empêche pas d’être très sensibles aux atouts économiques et culturels de ces derniers. Ils leur font de multiples emprunts. Celui qui illustre le mieux cette attitude qui mêle aversion et attraction est l’écriture dont ils dotent leur langue: leur alphabet, comme le grec, note les voyelles, mais pour les caractères ils imaginent le plus souvent des traces aussi différents que possible de ceux de leurs correspondants grecs. Cet anatolisme virulent ne faisait pas problème tant que la Pamphylie n’appartenait pas au monde grec. La situation changea avec la conquête macédonienne. C’est très probablement alors que surgit le récit qui faisait de Sidé une colonie de Kymé d’Eolide. Ce récit rattachait Side au moins partiellement au monde grec. Or rien, ni a Side ni a Kyme, ne le confirme: sans doute un des nombreux mythes qui apparurent, surtout a partir de l’époque hellénistique, pour installer une cite dans l’histoire grecque. Avec l’arrivee d’Alexandre (334 a. C.), le sidétique ne perdit pas immédiatement sa légitimité et il fut écrit jusqu’au tournant du IIIe au IIe siècle. Mais les bilingues qu’il nous a laissées et la forme sidétique des anthroponymes grecs montrent que les Sidètes s’emparèrent rapidement de la koiné grecque.