{"title":"La langue de Zemmour Cécile Alduy, Paris : Éditions Seuil, 2022, pp. 60","authors":"F. Martin","doi":"10.1017/s0008423922000968","DOIUrl":null,"url":null,"abstract":"politique de la théorie marxiste contemporaine. Selon lui, elle permet de penser un second « dehors » du capital, où peuvent se regrouper diverses pratiques militantes des mouvements sociaux. L’auteur, pour en arriver là, s’appuie sur les travaux du philosophe marxiste Alain Badiou. Grâce à ceux-ci, Walker remet brillamment à l’avant-scène un fait souvent occulté. Très souvent le marxisme est réduit à un économisme qui laisse peu de place à l’agentivité politique. Or, il n’en est rien selon Walker. Toutes les sociétés ont le potentiel de développer une situation limite d’où peut émerger une classe ouvrière mobilisée donc l’action sociale a le potentiel de mettre en exergue quelque chose de nouveau. À cet égard, Walker affirme que ce quelque chose peut être révélé par « le parti ». Dans l’avant-dernier chapitre, Walker revoit donc la notion de parti tel qu’elle a été entendue par Marx lui-même et par différents théoriciens marxistes. Avec l’effondrement de l’Union soviétique, c’est une certaine conception du parti qui disparaît. Loin d’être une organisation rigide et inflexible, le parti en soi est un corps, un appareil qui maintient un « procès de fidélité », à partir duquel une situation limite événementielle peut se maintenir dans le temps (347). Plus concrètement, le parti est aussi une entreprise collective de construction qui organise les forces sociales en mouvement politique. Le parti aujourd’hui ferait converger les différents courants anticapitalistes et antiétatistes. Le capital, en tant que structure de domination, se présente comme sans « dehors » et, pourtant, il dépend de la force de travail et de la terre qu’il ne peut produire lui-même. Il y a donc une possibilité d’émergence d’un sujet politique à partir de ces mêmes « dehors », qui peuvent lui échapper épisodiquement. Très dense théoriquement, Marx et la politique du dehors propose une réactualisation intéressante du concept d’accumulation initiale et de la théorie politique marxiste. Toutefois, l’emploi du jargon marxiste dilue la clarté du propos de Walker. Des sections auraient pu être aussi raccourcies pour rendre le propos plus limpide. Nous pensons notamment à la longue section dédiée à la discussion des travaux de Badiou (279–311). De plus, bien que Walker discute des divers « dehors » du capital, la nation occupe la plus grande partie de la discussion. Il aurait été intéressant de consacrer davantage d’espace aux autres « dehors » comme le sexe et le genre qui sont relativement peu discutés. Les stratégies de convergence entre les différentes luttes sociales ne sont pas non plus étayées. Malgré tout, l’ouvrage offre une thèse solide qui permet de penser qu’un autre monde n’est pas si éloigné : ce n’est pas parce que le capitalisme est partout que sa domination est totale.","PeriodicalId":9491,"journal":{"name":"Canadian Journal of Political Science","volume":"115 1","pages":"238 - 240"},"PeriodicalIF":0.0000,"publicationDate":"2023-03-01","publicationTypes":"Journal Article","fieldsOfStudy":null,"isOpenAccess":false,"openAccessPdf":"","citationCount":"0","resultStr":null,"platform":"Semanticscholar","paperid":null,"PeriodicalName":"Canadian Journal of Political Science","FirstCategoryId":"1085","ListUrlMain":"https://doi.org/10.1017/s0008423922000968","RegionNum":0,"RegionCategory":null,"ArticlePicture":[],"TitleCN":null,"AbstractTextCN":null,"PMCID":null,"EPubDate":"","PubModel":"","JCR":"","JCRName":"","Score":null,"Total":0}
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Abstract
politique de la théorie marxiste contemporaine. Selon lui, elle permet de penser un second « dehors » du capital, où peuvent se regrouper diverses pratiques militantes des mouvements sociaux. L’auteur, pour en arriver là, s’appuie sur les travaux du philosophe marxiste Alain Badiou. Grâce à ceux-ci, Walker remet brillamment à l’avant-scène un fait souvent occulté. Très souvent le marxisme est réduit à un économisme qui laisse peu de place à l’agentivité politique. Or, il n’en est rien selon Walker. Toutes les sociétés ont le potentiel de développer une situation limite d’où peut émerger une classe ouvrière mobilisée donc l’action sociale a le potentiel de mettre en exergue quelque chose de nouveau. À cet égard, Walker affirme que ce quelque chose peut être révélé par « le parti ». Dans l’avant-dernier chapitre, Walker revoit donc la notion de parti tel qu’elle a été entendue par Marx lui-même et par différents théoriciens marxistes. Avec l’effondrement de l’Union soviétique, c’est une certaine conception du parti qui disparaît. Loin d’être une organisation rigide et inflexible, le parti en soi est un corps, un appareil qui maintient un « procès de fidélité », à partir duquel une situation limite événementielle peut se maintenir dans le temps (347). Plus concrètement, le parti est aussi une entreprise collective de construction qui organise les forces sociales en mouvement politique. Le parti aujourd’hui ferait converger les différents courants anticapitalistes et antiétatistes. Le capital, en tant que structure de domination, se présente comme sans « dehors » et, pourtant, il dépend de la force de travail et de la terre qu’il ne peut produire lui-même. Il y a donc une possibilité d’émergence d’un sujet politique à partir de ces mêmes « dehors », qui peuvent lui échapper épisodiquement. Très dense théoriquement, Marx et la politique du dehors propose une réactualisation intéressante du concept d’accumulation initiale et de la théorie politique marxiste. Toutefois, l’emploi du jargon marxiste dilue la clarté du propos de Walker. Des sections auraient pu être aussi raccourcies pour rendre le propos plus limpide. Nous pensons notamment à la longue section dédiée à la discussion des travaux de Badiou (279–311). De plus, bien que Walker discute des divers « dehors » du capital, la nation occupe la plus grande partie de la discussion. Il aurait été intéressant de consacrer davantage d’espace aux autres « dehors » comme le sexe et le genre qui sont relativement peu discutés. Les stratégies de convergence entre les différentes luttes sociales ne sont pas non plus étayées. Malgré tout, l’ouvrage offre une thèse solide qui permet de penser qu’un autre monde n’est pas si éloigné : ce n’est pas parce que le capitalisme est partout que sa domination est totale.