{"title":"Une étude clinique de la dépersonnalisation–déréalisation chez trois jeunes adultes drépanocytaires homozygotes du Cameroun","authors":"Thierry Dong (Psychologue clinicien & psychopathologue)","doi":"10.1016/j.evopsy.2023.01.008","DOIUrl":null,"url":null,"abstract":"<div><h3>Objectif</h3><p>La dépersonnalisation est décrite comme banale et fréquente dans des registres aussi variés que l’hystérie, le trouble phobique et anxieux, les troubles dissociatifs, la dépression et la psychose. Tandis que très peu d’écrits en donnent une description clinique en rapport avec des atteintes plus spécifiquement somatiques comme la drépanocytose, le présent article donne une description dudit trouble chez trois jeunes adultes drépanocytaires homozygotes (SS) et tente d’en décrypter la psychopathologie et les processus inconscients responsables de son apparition dans un tel contexte.</p></div><div><h3>Méthode</h3><p>L’étude est exploratoire, descriptive et qualitative. La méthode appliquée est l’étude de cas. Les participants ont été sélectionnés en milieux hospitaliers dans la ville de Yaoundé au Cameroun. Les données ont été collectées à l’aide d’une grille d’entretien clinique de type semi-directif puis ont fait l’objet d’une analyse de contenu.</p></div><div><h3>Résultats</h3><p>Nous avons repéré chez ces participants des phénomènes de dépersonnalisation–déréalisation corrélés à des facteurs « contre-élaboratifs » – un sentiment trop présent de « mort imminente » – et une présence trop marquée des signes visibles de la maladie, elle-même liée à un environnement culturel marqué par la rareté de soins adaptés aux besoins biopsychosociaux des populations atteintes ; – et ainsi qu’à des registres psychopathologiques dont l’étiopathogénie s’aggrave à la faveur d’un vacillement identitaire et d’un infléchissement de la libido au moment d’entrer dans la vie adulte.</p></div><div><h3>Discussion</h3><p>Cette thèse remonte à Mayer Gross qui avait suggéré que la dépersonnalisation serait une réponse archaïque du cerveau à des situations de survie.</p></div><div><h3>Conclusion</h3><p>Ces résultats suggèrent une compréhension de la dépersonnalisation comme une attitude défensive du jeune adulte homozygote face à une réalité jugée trop menaçante. Un mouvement régressif comme retour à une phase primaire du développement où il faisait bon vivre.</p></div><div><h3>Objective</h3><p>Depersonalization is described as commonplace and frequent in such varied registers as hysteria, phobic and anxiety disorders, dissociative disorders, depression, and psychosis. However, very few papers give a clinical description in relation to more specifically somatic disorders such as sickle cell disease. This article describes the disorder in three young adults with homozygous sickle cell disease (SS) and attempts to decipher its psychopathology and the unconscious processes responsible for its appearance in this context.</p></div><div><h3>Method</h3><p>The study is exploratory, descriptive, and qualitative. The method applied is the case study. The participants were selected in hospitals in the city of Yaoundé in Cameroon. The data were collected using a clinical interview grid of the semi-directive type and then subjected to a content analysis.</p></div><div><h3>Results</h3><p>We identified depersonalization–derealization phenomena in these participants, correlated with “counter-elaborative” factors – an overly present feeling of “imminent death” – and an overly marked presence of visible signs of the disease. This is itself linked to a cultural environment marked by the scarcity of care adapted to the biopsychosocial needs of the affected populations, and to psychopathological registers whose etiopathogenesis is aggravated by a vacillation of identity and an inflection of the libido in the transition from adolescence to adulthood.</p></div><div><h3>Discussion</h3><p>This thesis is inspired by Mayer Gross who suggested that depersonalization is an archaic response of the brain to survival situations.</p></div><div><h3>Conclusion</h3><p>These results suggest an understanding of depersonalization as a defensive attitude of the homozygous young adult faced with a reality judged as too threatening, regressive movement as a return to a primary phase of development where life was good.</p></div>","PeriodicalId":45007,"journal":{"name":"Evolution Psychiatrique","volume":null,"pages":null},"PeriodicalIF":0.6000,"publicationDate":"2023-06-01","publicationTypes":"Journal Article","fieldsOfStudy":null,"isOpenAccess":false,"openAccessPdf":"","citationCount":"0","resultStr":null,"platform":"Semanticscholar","paperid":null,"PeriodicalName":"Evolution Psychiatrique","FirstCategoryId":"3","ListUrlMain":"https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0014385523000117","RegionNum":4,"RegionCategory":"医学","ArticlePicture":[],"TitleCN":null,"AbstractTextCN":null,"PMCID":null,"EPubDate":"","PubModel":"","JCR":"Q4","JCRName":"PSYCHIATRY","Score":null,"Total":0}
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Abstract
Objectif
La dépersonnalisation est décrite comme banale et fréquente dans des registres aussi variés que l’hystérie, le trouble phobique et anxieux, les troubles dissociatifs, la dépression et la psychose. Tandis que très peu d’écrits en donnent une description clinique en rapport avec des atteintes plus spécifiquement somatiques comme la drépanocytose, le présent article donne une description dudit trouble chez trois jeunes adultes drépanocytaires homozygotes (SS) et tente d’en décrypter la psychopathologie et les processus inconscients responsables de son apparition dans un tel contexte.
Méthode
L’étude est exploratoire, descriptive et qualitative. La méthode appliquée est l’étude de cas. Les participants ont été sélectionnés en milieux hospitaliers dans la ville de Yaoundé au Cameroun. Les données ont été collectées à l’aide d’une grille d’entretien clinique de type semi-directif puis ont fait l’objet d’une analyse de contenu.
Résultats
Nous avons repéré chez ces participants des phénomènes de dépersonnalisation–déréalisation corrélés à des facteurs « contre-élaboratifs » – un sentiment trop présent de « mort imminente » – et une présence trop marquée des signes visibles de la maladie, elle-même liée à un environnement culturel marqué par la rareté de soins adaptés aux besoins biopsychosociaux des populations atteintes ; – et ainsi qu’à des registres psychopathologiques dont l’étiopathogénie s’aggrave à la faveur d’un vacillement identitaire et d’un infléchissement de la libido au moment d’entrer dans la vie adulte.
Discussion
Cette thèse remonte à Mayer Gross qui avait suggéré que la dépersonnalisation serait une réponse archaïque du cerveau à des situations de survie.
Conclusion
Ces résultats suggèrent une compréhension de la dépersonnalisation comme une attitude défensive du jeune adulte homozygote face à une réalité jugée trop menaçante. Un mouvement régressif comme retour à une phase primaire du développement où il faisait bon vivre.
Objective
Depersonalization is described as commonplace and frequent in such varied registers as hysteria, phobic and anxiety disorders, dissociative disorders, depression, and psychosis. However, very few papers give a clinical description in relation to more specifically somatic disorders such as sickle cell disease. This article describes the disorder in three young adults with homozygous sickle cell disease (SS) and attempts to decipher its psychopathology and the unconscious processes responsible for its appearance in this context.
Method
The study is exploratory, descriptive, and qualitative. The method applied is the case study. The participants were selected in hospitals in the city of Yaoundé in Cameroon. The data were collected using a clinical interview grid of the semi-directive type and then subjected to a content analysis.
Results
We identified depersonalization–derealization phenomena in these participants, correlated with “counter-elaborative” factors – an overly present feeling of “imminent death” – and an overly marked presence of visible signs of the disease. This is itself linked to a cultural environment marked by the scarcity of care adapted to the biopsychosocial needs of the affected populations, and to psychopathological registers whose etiopathogenesis is aggravated by a vacillation of identity and an inflection of the libido in the transition from adolescence to adulthood.
Discussion
This thesis is inspired by Mayer Gross who suggested that depersonalization is an archaic response of the brain to survival situations.
Conclusion
These results suggest an understanding of depersonalization as a defensive attitude of the homozygous young adult faced with a reality judged as too threatening, regressive movement as a return to a primary phase of development where life was good.
期刊介绍:
Une revue de référence pour le praticien, le chercheur et le étudiant en sciences humaines Cahiers de psychologie clinique et de psychopathologie générale fondés en 1925, Évolution psychiatrique est restée fidèle à sa mission de ouverture de la psychiatrie à tous les courants de pensée scientifique et philosophique, la recherche clinique et les réflexions critiques dans son champ comme dans les domaines connexes. Attentive à histoire de la psychiatrie autant aux dernières avancées de la recherche en biologie, en psychanalyse et en sciences sociales, la revue constitue un outil de information et une source de référence pour les praticiens, les chercheurs et les étudiants.