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Abstract
Selon le point de vue d’une anthropologie du regard, cet article s’interesse aux rapports entre corps sensible et environnement urbain, en particulier aux mutations perceptives et cognitives intervenues dans les annees 1960 en Occident, telles que Jacques Tati les rendit fascinantes dans un film — Playtime — devenu un classique du cinema.Maitre de la description et de l’analyse filmee de gestes et de comportements sociaux-types des classes moyennes en milieu urbain, Jacques Tati propose un film qu’il veut « matiere » filmique « sonore et visuelle » plutot que le recit filme d’une histoire centree sur un sujet. Il y confronte son personnage, Hulot, a un passage sans transition des formes familieres d’une capitale historique (Paris), qui permettent une deambulation paisible, aux signaletiques et composantes plastiques et formelles epuisantes et trompeuses d’une grande ville qui fait monde, sans hors-champ spatial et temporel : une ville qui s’impose comme sa version internationale moderniste plutot que moderne, ubiquitaire et atemporelle, vouee a la communication, la circulation et la consommation accelerees.Perdu dans une « quete » decevante qui multiplie boucles et impasses, Hulot souvent parait se dissoudre — corps sans ombre — au gre d’avatars, doubles et reflets, et ce, en depit des vertus de la transparence et de la communication considerees comme solidaires du « nouvel » environnement architectural et urbain. Se manifeste alors l’amenuisement du « moi, du sujet, de la personne » (Mauss) dans l’opacite et l’absurde de la perte de sens, la negation de l’histoire, qui accompagnent l’exigence presumee « fonctionnelle » du seriel et de l’indifferencie.