{"title":"La tour ou un chien à Chinatown by Doan Bui (review)","authors":"","doi":"10.1353/wfs.2023.a909499","DOIUrl":null,"url":null,"abstract":"Reviewed by: La tour ou un chien à Chinatown by Doan Bui Gloria Kwok Bui, Doan. La tour ou un chien à Chinatown. Grasset, 2022. Pp. 348. ISBN 978-2-246-82499-2. 20,90€ (papier). Journaliste et auteure (elle est également auteure du récit autobiographique Le silence de mon père, paru chez l'Iconoclaste en 2016), Doan Bui nous livre dans son premier roman, La tour ou un chien à Chinatown, les destins des locataires de la tour Melbourne, une tour de « 296 cases » et « 37 étages » (11). À la manière de Georges Perec de La vie mode d'emploi paru en 1978 dont une citation a été mise en exergue du livre (Perec, lui, suit la vie des habitants d'un bâtiment haussmannien), l'auteure précise que c'est une tour fictive du vrai quartier des Olympiades au cœur de Chinatown dans le 13ème arrondissement de Paris. Les Olympiades, cet ensemble de grandes tours essentiellement résidentielles, ont vu le jour dans les années 1970. Ces tours devaient loger des familles de cadres supérieurs ; au début des années 1980, elles ont accueilli « tous les réfugiés fuyant le régime communiste vietnamien ou le Cambodge de Pol Pot » (21). Le roman se lit comme un puzzle où les lecteurs doivent assembler les pièces. Parmi ses personnages hauts en couleurs, on croise la famille Truong, une famille des boat people qui ont fui le Vietnam après la chute de Saigon en 1979. Il y a Victor, le mari qui doit son prénom à Victor Hugo, et déclame toujours du Victor Hugo dans son accent vietnamien ; sa femme Alice qui adore le vietnamien, et confond le mot « beurette » avec les « petits beurres » de la marque Lu que mange sa fille ; et leur fille Anne-Maï Truong, née en France, qui rêve d'être une blonde. Ils sont parrainés par Philippe et Armelle Trudaine qui habitent dans le 16ème arrondissement, l'occasion pour Doan Bui de dépeindre avec sarcasme le monde des familles bourgeoises qui parrainaient volontiers des réfugiés. Un autre voisin des époux Truong est Clément Pasquier, un bâtard d'une longue lignée noble des Pasquier du Mans monté à Paris, qui se prend pour la réincarnation de Clément, le chien mort de Michel Houellebecq, son idole. On trouve aussi Ileana Antonescu, la pianiste roumaine désormais devenue nounou d'Adèle, la fille des Trudiane ; Virgile, un sans-papier sénégalais passionné de Proust qui squatte le sous-sol ; et Bich et Liêm, les enfants de Lam, un vieil ami de Victor Truong. Bref, les personnages dont la vie est marquée par l'immigration et l'exil. L'histoire touche à son paroxysme dans le dernier chapitre. En 2045, les anciens habitants de la tour Melbourne y compris les Truong ont dû quitter le quartier à cause des prix exorbitants, et ils ne reconnaissent plus les nouvelles Olympiades, surélevées et dotées des piscines, plantes et fleurs, et boîtes de nuit. L'artisan de ces « Olympiades du futur » (314) est un milliardaire chinois. Pour repeupler la ville avec des oiseaux, il embauche Adèle Trudaine, diplômée en ornithologie, comme chef du projet. Anne-Maï est licenciée par Armelle Trudaine par Zoom à la sortie du confinement dû au coronavirus. Elle rencontre sa voisine Ileana. Ayant vécu toutes les deux la perte d'une enfant, les endeuillées se mettent en couple et adoptent une fille, Rosa. Elles s'installent près des vieux Truong qui finissent leur vie en maison de retraite et puis en maison médicalisée pour patients Alzheimer dans la Somme. Virgile s'enrichit en écrivant des récits pour les demandeurs d'asile et continue à vivre dans la tour Melbourne. Clément Pasquier est accusé d'avoir agressé Michel Houellebecq (un occupant des Olympiades) et [End Page 172] il se trouve dans la même prison que Liêm, un musulman converti devenu gourou. Ces deux anciens co-détenus deviennent un couple. Dans La tour, Doan Bui décrit la France d'aujourd'hui...","PeriodicalId":391338,"journal":{"name":"Women in French Studies","volume":"65 1","pages":"0"},"PeriodicalIF":0.0000,"publicationDate":"2023-01-01","publicationTypes":"Journal Article","fieldsOfStudy":null,"isOpenAccess":false,"openAccessPdf":"","citationCount":"0","resultStr":null,"platform":"Semanticscholar","paperid":null,"PeriodicalName":"Women in French Studies","FirstCategoryId":"1085","ListUrlMain":"https://doi.org/10.1353/wfs.2023.a909499","RegionNum":0,"RegionCategory":null,"ArticlePicture":[],"TitleCN":null,"AbstractTextCN":null,"PMCID":null,"EPubDate":"","PubModel":"","JCR":"","JCRName":"","Score":null,"Total":0}
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Abstract
Reviewed by: La tour ou un chien à Chinatown by Doan Bui Gloria Kwok Bui, Doan. La tour ou un chien à Chinatown. Grasset, 2022. Pp. 348. ISBN 978-2-246-82499-2. 20,90€ (papier). Journaliste et auteure (elle est également auteure du récit autobiographique Le silence de mon père, paru chez l'Iconoclaste en 2016), Doan Bui nous livre dans son premier roman, La tour ou un chien à Chinatown, les destins des locataires de la tour Melbourne, une tour de « 296 cases » et « 37 étages » (11). À la manière de Georges Perec de La vie mode d'emploi paru en 1978 dont une citation a été mise en exergue du livre (Perec, lui, suit la vie des habitants d'un bâtiment haussmannien), l'auteure précise que c'est une tour fictive du vrai quartier des Olympiades au cœur de Chinatown dans le 13ème arrondissement de Paris. Les Olympiades, cet ensemble de grandes tours essentiellement résidentielles, ont vu le jour dans les années 1970. Ces tours devaient loger des familles de cadres supérieurs ; au début des années 1980, elles ont accueilli « tous les réfugiés fuyant le régime communiste vietnamien ou le Cambodge de Pol Pot » (21). Le roman se lit comme un puzzle où les lecteurs doivent assembler les pièces. Parmi ses personnages hauts en couleurs, on croise la famille Truong, une famille des boat people qui ont fui le Vietnam après la chute de Saigon en 1979. Il y a Victor, le mari qui doit son prénom à Victor Hugo, et déclame toujours du Victor Hugo dans son accent vietnamien ; sa femme Alice qui adore le vietnamien, et confond le mot « beurette » avec les « petits beurres » de la marque Lu que mange sa fille ; et leur fille Anne-Maï Truong, née en France, qui rêve d'être une blonde. Ils sont parrainés par Philippe et Armelle Trudaine qui habitent dans le 16ème arrondissement, l'occasion pour Doan Bui de dépeindre avec sarcasme le monde des familles bourgeoises qui parrainaient volontiers des réfugiés. Un autre voisin des époux Truong est Clément Pasquier, un bâtard d'une longue lignée noble des Pasquier du Mans monté à Paris, qui se prend pour la réincarnation de Clément, le chien mort de Michel Houellebecq, son idole. On trouve aussi Ileana Antonescu, la pianiste roumaine désormais devenue nounou d'Adèle, la fille des Trudiane ; Virgile, un sans-papier sénégalais passionné de Proust qui squatte le sous-sol ; et Bich et Liêm, les enfants de Lam, un vieil ami de Victor Truong. Bref, les personnages dont la vie est marquée par l'immigration et l'exil. L'histoire touche à son paroxysme dans le dernier chapitre. En 2045, les anciens habitants de la tour Melbourne y compris les Truong ont dû quitter le quartier à cause des prix exorbitants, et ils ne reconnaissent plus les nouvelles Olympiades, surélevées et dotées des piscines, plantes et fleurs, et boîtes de nuit. L'artisan de ces « Olympiades du futur » (314) est un milliardaire chinois. Pour repeupler la ville avec des oiseaux, il embauche Adèle Trudaine, diplômée en ornithologie, comme chef du projet. Anne-Maï est licenciée par Armelle Trudaine par Zoom à la sortie du confinement dû au coronavirus. Elle rencontre sa voisine Ileana. Ayant vécu toutes les deux la perte d'une enfant, les endeuillées se mettent en couple et adoptent une fille, Rosa. Elles s'installent près des vieux Truong qui finissent leur vie en maison de retraite et puis en maison médicalisée pour patients Alzheimer dans la Somme. Virgile s'enrichit en écrivant des récits pour les demandeurs d'asile et continue à vivre dans la tour Melbourne. Clément Pasquier est accusé d'avoir agressé Michel Houellebecq (un occupant des Olympiades) et [End Page 172] il se trouve dans la même prison que Liêm, un musulman converti devenu gourou. Ces deux anciens co-détenus deviennent un couple. Dans La tour, Doan Bui décrit la France d'aujourd'hui...