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Abstract
Les pannes mecaniques ont ete au cœur de l’histoire de la periode moderne, de ses cultures materielles, de ses ambitions politiques, de ses angoisses culturelles et de ses rythmes sociaux. Les historiens ont neanmoins traite les machines defaillantes comme des objets sans histoire propre. Ce document creuse les significations riches et variees que les pannes de machines ont eues dans leur propre temps pour les gens qui ont vecu avec elles et a travers elles. Il explore un episode particulierement eclairant de l’histoire des mondes brises : les profondes angoisses suscitees par l’echec de la guillotine au debut de la Revolution francaise. Le document part du principe que, tout au long de la periode moderne, les gens ont apprehende le probleme des machines defaillantes comme un probleme relatif a l’individu – un probleme relie aux personnes qui en etaient la cause, redoutaient ou presupposaient leurs defaillances. L’article soutient la these que les inquietudes au sujet de l’echec de la guillotine etaient enracinees dans ses origines, en tant que machine sentimentale, un dispositif ne de l’union entre une psychologie profondement publique, sentimentaliste de la fin du xviiie siecle et les arts mecaniques contemporains. Se concentrant sur la periode qui a precede la Terreur, l’article examine comment la crainte d’une defaillance mecanique a relie la conception et la construction de la guillotine a un theâtre plus large de machines potentiellement defaillantes destinees a assurer la solvabilite financiere, la survie militaire et l’infrastructure urbaine dans l’imaginaire technique de la premiere Republique francaise. A travers cet examen, l’article va au-dela de son sujet immediat inscrit dans le xviiie siecle. Il demontre largement comment l’echec a faconne la forme meme des technologies modernes en posant des problemes d’ordre social autour de machines defaillantes, reelles et imaginaires. Il elargit l’idee centrale de ce numero special de Techniques&Culture en interrogeant comment l’echec est consubstantiel non seulement aux objets et aux corps techniques, mais aussi aux objets techniques et aux soi historiques. Et il illustre comment l’histoire des echecs techniques permet de comprendre les histoires complexes et contradictoires du moi et des ordres sociaux qu’elle a rendus possibles, y compris les notres.